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16 février 2015 1 16 /02 /février /2015 15:04

 

Pour lire l’intégralité de l’article :

http://www.ledevoir.com/societe/medias/431925/un-jouisseur-et-son-destin?utm_source=infolettre-2015-02-16&utm_medium=email&utm_campaign=infolettre-quotidienne

 

Un jouisseur et son destin

16 février 2015 |Stéphane Baillargeon | 

Le président François Mitterrand avait résumé prophétiquement le personnage de Dominique Strauss-Kahn au début des années 1990 en disant qu’il n’était qu’« un jouisseur sans destin ».

C’était faire trop peu de cas de sa sortie spectaculaire de la scène publique, après une montée fulgurante. L’ex-directeur du FMI, pressenti comme favori dans la course présidentielle, a éclaté en plein envol, comme une navette spatiale. C’était peut-être là son affligeante fatalité. 

« Qui nous impose ce théâtre obligatoire, demande un blogueur de Ouest-France. Combien de plateaux, de talk-shows, de commentaires, de micros et de caméras tendus faut-il pour que le phénomène soit soigneusement disséqué au nom de la sacro-sainte info ? Le public est censé sacrifier à la pulsion scopique, au fantasme de tout voir, de tout savoir. Comme s’il y avait derrière tout cela un vrai mystère après lequel nous soupirons, quelque révélation qui pourrait changer notre vie et le monde. »

 

Et pourquoi pas ? Cette triste tragédie des mœurs en dit autant sur le sujet, les médias et leur société.

On y retrouve en concentré la confrontation de deux perspectives fondamentales. 

D’un côté, DSK et son cercle de présumés proxénètes assument une sorte de droit de cuissage dans un vocabulaire libertin d’aristocrate dévoyé. C’est un monde de vieux machistes qui font trafic de femmes, en usent et en abusent à volonté. 

D’un autre côté, il y a la tradition humaniste et féministe s’efforçant de dénoncer les violences, les abus et les humiliations faits aux victimes dans cette affaire, toutes des femmes empêtrées dans la prostitution par des situations socio-économiques pénibles. Quand le huis clos réclamé leur a été refusé, elles ont raconté leurs vies déchirées dans un mélange de honte et de dignité.

 

Jade a parlé de « boucherie », d’« empalement ». Elle a raconté comment elle était devenue prostituée. « J’ai ouvert le frigo, a dit la mère célibataire. Je savais que j’allais avoir une enquête sociale pour la garde de mes enfants et j’ai vu que le frigo était vide. […] On ne choisit pas cette vie-là. Je ne me suis jamais acheté de sac ou une paire de bottes de marque. Et dès que je pouvais, je retrouvais un boulot par intérim. »

  

L’effondrement du « jouisseur sans destin » aura au moins servi à briser l’immunité de fait maquillée en antipuritanisme. Au Monde, par exemple, le travail remarquable de la chroniqueuse judiciaire Pascale Robert-Diard, tout en finesse et en compassion, fait ressortir les enjeux sociopolitiques en farfouillant dans la boue.

 

Ainsi dans ce blogue du 12 février racontant le témoignage du diacre s’occupant de la lutte contre la prostitution et du soutien aux prostitués dans le Nord–Pas-de-Calais. C’est de lui que Jade a obtenu de l’aide.

« Et soudain, dans cette salle d’audience si lourde d’impudeur et de vulgarité, la dignité s’est exprimée », écrit la journaliste dont les textes sont accompagnés de dessins de François Boucq qui amplifient le résultat. « Bernard Lemettre aide depuis quarante ans des femmes à sortir de la prostitution. Il parle cru lui aussi pour raconter la réalité de leur condition. “Sortir de la prostitution c’est comme sortir d’un tombeau. Personne n’arrive à la prostitution comme ça, par volonté. Il y a toujours des fragilités. Après, il faut réapprendre à vivre avec un corps qui a été pénétré, violé”.»

 

 

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commentaires

F
Très bon article, à noter aussi ce commentaire d'un lecteur:"Un jour, nous regarderons notre époque en nous demandant comment nous avons pu mettre en place une société si exempte d'empathie que les<br /> sociopathes étaient les plus aptes à parvenir aux échelons les plus élevés de notre gouvernance."
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