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21 janvier 2012 6 21 /01 /janvier /2012 00:18

St Ignace de Loyola ( 16èmesiècle, fondateur des jésuites) a écrit un livre intitulé : les Exercices Spirituels. Ce n’est pas un livre à lire mais à faire. On le trouve en librairie, mais il n’est pas à acheter ! C’est un guide pour accompagnateurs-trices. C'est-à-dire pour celles et ceux qui sont formé-es pour aider d’autres à entrer dans une démarche de méditation durant une retraite spirituelle.

Il commence par le texte qui a pour titre : Principe et fondement. C’est un texte qui n’est pas facile à accueillir. Surtout dans le monde et la culture qui sont les nôtres. C’est pourquoi, je vous propose ce commentaire qui, je l’espère, permet de dépasser les difficultés et ouvre à son intelligence.

 

Voici le texte :

2       L'homme est créé pour louer, révérer et servir Dieu notre Seigneur et par là sauver son âme,  

3       et les autres choses sur la face de la terre, sont créées pour l'homme, et pour l'aider dans la poursuite de la fin pour laquelle il est créé.

4       D'où il suit que l'homme doit user de ces choses dans la mesure où elles l'aident pour sa fin et qu'il doit s'en dégager dans la mesure où elles sont, pour lui, un obstacle à cette fin.

5       Pour cela il est nécessaire de nous rendre indifférents à toutes les choses créées, en tout ce qui est laissé à la liberté de notre libre-arbitre et ne lui est pas défendu ;

6       de telle manière que nous ne voulions pas, pour notre part, davantage la santé que la maladie, la richesse que la pauvreté, l'honneur que le déshonneur, une vie longue qu'une vie courte et ainsi de suite pour tout le reste,

7       mais que nous désirions et choisissions uniquement ce qui nous conduit davantage à la fin pour laquelle nous sommes créés.

 

Voici mon commentaire

L’Homme est créé

Je vous invite à pouvoir d’abord peser ce que cette phrase a de positif pour nous : être créé-e par Dieu veut dire que nous sommes désiré-es par lui. Nous ne sommes pas le fruit du hasard et allant vers le néant, nous sommes le fruit d’un désir en vue d’une relation d’amitié qui ne connaîtra pas de fin.

En plus pas créé n’importe comment : à son image et ressemblance.

Mais on peut sentir une résistance en nous, et il est bon d’en prendre conscience. Etre créé-e c’est aussi ne pas être sa propre origine, c’est la devoir à un autre, c’est se recevoir d’un autre. Est-ce que je sens cela ? La résistance peut venir d’une image fausse de cette création. Créé-e ne veut pas dire formater, fabriquer comme on fabrique un robot. Non. C’est être créé-e à son image, c’est-à-dire liberté, créateur, capable d’aimer, d’inventer sa vie, de réaliser l’être unique que chacun est.

Il est important de sentir ce qui s’agite en vous avec cette phrase. De dialoguer avec Dieu la-dessus et d’en parler.

 

Pour louer, respecter et servir Dieu notre Seigneur

Ces mots disent une réponse de notre part. Pour bien y entrer, il est nécessaire de comprendre que c’est une réponse justement et non un impératif arbitraire. Pourquoi louer, servir, respecter Dieu ?

Parce que c’est d’abord Dieu qui nous loue, nous sert, nous respecte. Quand Dieu en Genèse 1 dit devant l’humain, homme et femme sortit de ses mains : « Ceci est très bon », quand il les bénit, c’est à dire dit du bien d’eux, il est le premier à louer.

Parce que c’est d’abord Dieu qui nous sert, il nous sert par la création, il se fait notre serviteur en Jésus. « Je ne suis pas venu pour être servi mais pour servir et donner sa vie … » Mt 20/28

Parce que c’est d’abord lui qui nous respecte infiniment.

Donc peser l’expérience que vous avez de louange, du service, du respect que Dieu a pour nous. De manière à entendre les mots d’Ignace comme une réponse que vous avez envie de donner en réciprocité : louer comme il me loue, servir comme il me respecte, respecter comme il me respecte. C’est une réponse d’amitié

 

Et par là sauver son âme

Il y a équivalence entre louer, servir, respecter et sauver son âme.

Qu’est-ce à dire ?  Si Dieu lui-même loue, sert, respecte, c’est que c’est un chemin de vie. S’il nous le propose, c’est parce que c’est un chemin de vie qu’il veut partager avec nous.

Sauver son âme. Ne le prenons pas dans un sens étroit (le salut après la mort et ne concernant que l’âme.)  Cela veut dire : « …et par là vivre à plein, trouver sa profonde raison d’être, son vrai accomplissement, être vivant et faire vivre autour de soi » Que le sens de ma vie est là, la fin, c’est à dire la finalité de mon existence est dans cette louange, ce service, ce respect.

 

Les autres choses sur la face de la terre sont créées pour l’homme

et pour l’aider à poursuivre cette fin pour laquelle il a été créé

Cette phrase  n’a l’air de rien, pourtant elle est fondamentale. Ici nous sommes dans l’originalité des Exercices. Cela veut dire :

Que le monde est bon, qu’il est don de Dieu. Un don fait à l’homme. Les choses, c’est à dire le monde, les biens terrestres, les relations humaines, la sexualité, etc.

Ici nous sommes à l’opposé d’une conception qui a pu courir dans le christianisme et qui peut encore sévir qui dit qu’il faut se méfier du monde, que le salut passe forcément par la non- possession, par la fuite du monde. Non, c’est un don qui a pour raison d’être d’aider l’homme à louer, servir et respecter Dieu. Donc les choses sont là pour m’aider à réaliser le sens, la finalité de mon existence.

 

Il s’ensuit que l’homme

-doit en user

            dans la mesure où elles lui sont une aide pour sa fin

-s’en dégager

            dans la mesure où elles lui sont un obstacle

Là nous sommes au cœur des Exercices, car ils sont là justement pour vivre un choix : qu’est-ce que je dois choisir, à quoi dois-je renoncer ? En comprenant bien que il s’agit

*d’user de choses qu’on a dit bonnes et

*de renoncer à des choses qui sont bonnes aussi

Ce n’est pas un choix ici entre du bien et du mal. Mais entre un bien et au autre bien

Par exemple, le choix entre le bien qui est de se marier et le bien qui est la vie religieuse.

Ce qui va me permettre de décider, ce n’est pas un commandement, une loi, une hiérarchie objective (entre un meilleur en soi et un moins bon en soi), quelque chose qui viendrait du dehors de moi. Non, cela va être une recherche à l’intérieur de moi. Avec un seul critère : je choisirai ce qui POUR MOI sera le plus aidant pour louer, servir, respecter Dieu comme lui me loue, me sert, me respecte.

Cela veut dire que les choses sont bonnes mais qu’elles sont relatives et qu’il ne faut pas les absolutiser. Elles sont à mesurer à l’aune d’un plus grand qu’elles. Elles sont à peser en fonction d’une finalité. Cela revient à dire qu’il s’agit de mettre Dieu comme unique absolu. Je vais en user si cela me permet de mieux servir et aimer Dieu.

Je vais m’en dégager si cela ne me permet pas de le servir et l’aimer.

 

Pour cela

C’est à dire pour vraiment faire un choix selon la finalité de mon être, Ignace propose une attitude provisoire de détachement de nos préférences, de nos idées, de nos projets.

Cela me tente bien de prendre ce poste de responsabilité par exemple. Je ne dis pas tout de suite oui. Cela ne me dit rien de prendre cet engagement. Je ne dis pas tout de suite non.

 

Il faut nous rendre indifférents

Le mot est sujet à incompréhension. Il veut dire, je ne vais pas décider sur un coup de tête, je vais prendre du recul, je ne vais pas décider sur le plus superficiel d’une envie (ça me tente) ou d’un recul ( ça ne me dit rien).

-Je dois prendre acte de la fascination ou de la répulsion que des choses peuvent avoir sur moi et qui peuvent entraver ma liberté et obscurcir mon désir profond.

-Je vais essayer de me libérer de préférences ou de refus qui peuvent être superficiels pour donner chance à ce que remonte du plus profond de moi,  ce que je désire vraiment

Il s’agit de remettre les choses à plat, d’entrer dans une disponibilité, une ouverture à ce qui va venir grâce à la prière. Cela se fera par mon écoute de Dieu,  par la contemplation de la vie du Christ, par l’écoute des mouvements intérieurs que cette parole va provoquer en moi et que je vais discerner avec l’aide de l’accompagnateur-trice.

 

De telle manière que nous ne voulions pas , quant à nous

Ne pas vouloir est à bien comprendre aussi : Il faut entendre ne pas m’y accrocher au point que cela obscurcirait mon jugement

 

Santé plus que maladie

Richesse plus que pauvreté

Honneur plus que déshonneur

Vie longue plus que vie courte

Et ainsi de tout le reste

Bien sur qu’il est bon de vouloir être en bonne santé mais si je m’accroche tellement à cette  préoccupation que cela m’empêche d’envisager des choix qui me feraient vivre…Ignace conseille de prendre de la distance par rapport à cela

Et ainsi du reste

 

Mais que nous désirions et choisissions

uniquement

ce qui nous conduit

davantage

à la fin pour laquelle nous sommes crées

Nous retrouvons ici ce qui doit être la boussole de nos choix :

la finalité de notre existence. Choisir ce que j’aurai découvert être le désir profond de mon être, après avoir désensablé ma source pour en faire jaillir un acte libre, pour réussir ma vie dans une vie d’amitié avec Dieu.

 

 

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commentaires

S
Très bien expliqué!!
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