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22 mars 2012 4 22 /03 /mars /2012 10:10

Ce récit de guérison (Mc 5, 25-34) peut nous éveiller à la liberté de Jésus. Pourquoi veut-Il savoir qui l’a touché ? Il sait qu’Il a guéri quelqu’un, cela ne lui suffit-Il pas ? Que veut-Il de plus ? Sûrement une rencontre personnelle. Car nous le savons, Il est plus qu’un « guérisseur », Il est sauveur. Le salut qu’Il donne, c’est d’abord Lui-même, c’est le cadeau d’une rencontre, d’une attention à l’autre, d’une question qui suscite une réponse, d’un dialogue qui s’installe.

 

Mais pour cette femme, le salut prend une dimension supplémentaire. Cette maladie dont elle souffre, est source d’exclusion sociale. Elle est considérée comme « impure » (Lv 15/9) et si elle a un contact physique avec quelqu’un, elle le rendra impur ! Au regard de cette loi religieuse, elle a donc rendu impurs tous les gens qu’elle a touchés dans la foule et Jésus Lui-même.

C’est donc une transgression majeure qui nous explique la stratégie d’anonymat de cette femme !

Et pour Jésus, vouloir rendre public aux yeux de tous cette guérison,  est une prise de position : Jésus ne se considère pas comme impur d’avoir été touché par elle et donc de fait, déclare caduque cette loi d’impureté qui excluait les femmes qui en étaient atteintes.

 

L’appeler « Ma fIlle » n’est pas anodin. Dans un cas semblable de situation d’exclusion,  à Zachée le publicain, Jésus dira : «  N’est-Il pas lui aussi fIls d’Abraham ? » (Lc 19/9). Ainsi, les  paroles qu’Il adresse à cette femme, lui rendent sa dignité, la valorisent au sujet de sa foi, la réintroduisent dans l’espace social, lui font cadeau de la paix.

 

Jésus a donné à cette femme « le désir et la force de briser les chaînes du destin qui entravaient sa liberté…la clarté libératrice de son enseignement a exorcisé sa peur. Il lui a rendu possible un avenir différent et Lui a rendu la parole à elle qui en était dépossédée » (Voir le livre de  J. MOINGT, l’homme qui venait de Dieu, Cerf, 2002, Cogitatio fidei n°176, p 47)

 

Voici la force libératrice de l’Evangile.

 

[25] Or, une femme atteinte d'un flux de sang depuis douze années,

[26] qui avait beaucoup souffert du fait de nombreux médecins et avait dépensé tout son avoir sans aucun profit, mais allait plutôt de mal en pis,

[27] avait entendu parler de Jésus ; venant par derrière dans la foule, elle toucha son manteau.

[28] Car elle se disait : "Si je touche au moins ses vêtements, je serai sauvée."

[29] Et aussitôt la source d'où elle perdait le sang fut tarie, et elle sentit dans son corps qu'elle était guérie de son infirmité.

[30] Et aussitôt Jésus eut conscience de la force qui était sortie de lui, et s'étant retourné dans la foule, il disait "Qui a touché mes vêtements ?"

[31] Ses disciples lui disaient : "Tu vois la foule qui te presse de tous côtés, et tu dis : Qui m'a touché ?"

[32] Et il regardait autour de lui pour voir celle qui avait fait cela.

[33] Alors la femme, craintive et tremblante, sachant bien ce qui lui était arrivé, vint se jeter à ses pieds et lui dit toute la vérité.

[34] Et il lui dit : "Ma fille, ta foi t'a sauvée ; va en paix et sois guérie de ton infirmité."

 

 

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18 mars 2012 7 18 /03 /mars /2012 23:59

La source de la liberté de Jésus se trouve dans le récit du baptême quand il reçoit cette parole:

« Celui-ci est mon fils, l’Aimé en qui je me plais »

Etre fils en qui le Père se complaît, c’est n’avoir rien à prouver, rien à conquérir, car tout est déjà donné, offert.

Il ne peut donc plus avoir cette quête anxieuse, ce besoin de reconnaissance, cette avidité pour ce qu’on n’a pas, qui, pour nous, peut tellement nous rendre prisonniers des choses et des autres.

Il s’agit donc d’entendre cette parole du Père au Fils, l’entendre comme une parole qui dit sa liberté et croire que cela ne concerne pas seulement Jésus mais que c’est aussi pour nous, car Jésus  est venu pour nous partager sa liberté de Fils.

A nous aussi, le Père dit « Tu es mon fils, ma fille,

l’Aimé-e en qui je me plais ».

 

Et de ce fait, comme Jésus, nous pouvons dire des « oui » et des « non ».

Le oui de la foi,

et le non au doute qu’essaie d’insinuer le diable.

Le oui au manque,

comme espace pour creuser le désir, recevoir les êtres et les choses comme un don,

et le non à l’immédiateté du tout  tout-de-suite qui veut accaparer pour soi seul.

Le oui du long cheminement de la foi,

et le non de ce qui veut s’imposer par la force de l’évidence.

Le oui à un déjà donné de toute éternité, gratuitement par pure grâce,

et le non à un donnant-donnant, à la puissance au prix du rejet de l’amour.

 

Jésus sait qu’il est le Fils, donc que tout ce qui est au Père est à lui. C’est pourquoi, il est libre.

Il en est de même pour nous, puisque le Christ nous a fait cohéritiers avec lui.

Usons de cette liberté pour dire oui à la vie.

 

Matthieu 3/13-17

13] Alors Jésus arrive de la Galilée au Jourdain, vers Jean, pour être baptisé par lui.

[14] Celui-ci l'en détournait, en disant : "C'est moi qui ai besoin d'être baptisé par toi, et toi, tu viens à moi !"

[15] Mais Jésus lui répondit : "Laisse faire pour l'instant : car c'est ainsi qu'il nous convient d'accomplir toute justice." Alors il le laisse faire.

[16] Ayant été baptisé, Jésus aussitôt remonta de l'eau ; et voici que les cieux s'ouvrirent : il vit l'Esprit de Dieu descendre comme une colombe et venir sur lui.

[17] Et voici qu'une voix venue des cieux disait : "Celui-ci est mon Fils bien-aimé, qui a toute ma faveur.

Matthieu 4/1-4

[1] Alors Jésus fut emmené au désert par l'Esprit, pour être tenté par le diable.

[2] Il jeûna durant 40 jours et 40 nuits, après quoi il eut faim.

[3] Et, s'approchant, le tentateur lui dit : "Si tu es Fils de Dieu, dis que ces pierres deviennent des pains."

[4] Mais il répondit : "Il est écrit : Ce n'est pas de pain seul que vivra l'homme, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu"

[5] Alors le diable le prend avec lui dans la Ville Sainte, et il le plaça sur le pinacle du Temple

[6] et lui dit : "Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et sur leurs mains ils te porteront, de peur que tu ne heurtes du pied quelque pierre."

[7] Jésus lui dit : "Il est encore écrit : Tu ne tenteras pas le Seigneur, ton Dieu."

[8] De nouveau le diable le prend avec lui sur une très haute montagne, lui montre tous les royaumes du monde avec leur gloire

[9] et lui dit : "Tout cela, je te le donnerai, si, te prosternant, tu me rends hommage."

[10] Alors Jésus lui dit : "Retire-toi, Satan ! Car il est écrit : C'est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, et à Lui seul tu rendras un culte."

[11] Alors le diable le quitte. Et voici que des anges s'approchèrent, et ils le servaient.

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14 mars 2012 3 14 /03 /mars /2012 18:36

Quelle joie de pouvoir être auditeurs de l’Evangile comme nous le sommes !

Quelle joie de pouvoir nous glisser dans ce groupe de publicains et de pécheurs  et comme eux s’approcher et écouter une parole où Jésus nous dit la valeur, le prix que nous avons à ses yeux.

Et oui, ces deux paraboles (comme la troisième bien connue, dite du « fils retrouvé ») nous disent d’abord le prix que nous avons aux yeux de Dieu. Elles nous comparent à une brebis, une pièce d’argent et un enfant. Ces comparaisons disent toutes les trois à leur manière une richesse et  une valeur qui ne doivent pas se perdre et qui demandent de tout mettre en œuvre pour être retrouvées. Et à chaque fois, cette valeur ou richesse est unique. Car pour Dieu, chacun, chacune de nous est sa brebis préférée, sa pièce précieuse, son enfant bien-aimé-e !

Qu’il est meilleur le regard de Dieu sur nous si nous le comparons à celui que nous avons sur nous-mêmes !

 

C’est pourquoi l’Evangile est bonne nouvelle. C’est pourquoi l’appel à la conversion est appel à changer notre regard. En fait, c’est faire un échange : renoncer au nôtre et accueillir celui de Dieu. Je suis sa brebis préférée, sa pièce précieuse, son enfant bien-aimé-e et il n’a de cesse de me chercher, de me trouver et de me retrouver.

 

L’autre lieu de conversion est donc aussi un appel à transformer nos images de Dieu. Sont-elles en coïncidence  avec ce qui nous est révélé ici de Dieu ?

Dieu comme un berger qui court à ma recherche, qui me met sur ses épaules.

Dieu comme une femme qui allume une lampe pour me chercher sans se lasser.

Dieu comme un père qui fait la fête à l’enfant retrouvé que je suis.

 

Oui, c’est bien de bonnes nouvelles pour notre vie dont l’Evangile est porteur. Laissons-nous libérer par elles. Ce sont elles qui peuvent dilater notre cœur et transformer quelque chose en nos vies.


Dans l'Evangile de Luc au chapitre 15 verset 1 à 10

[1] Cependant tous les publicains et les pécheurs s'approchaient de lui pour l'entendre.

[2] Et les Pharisiens et les scribes de murmurer : "Cet homme, disaient-ils, fait bon accueil aux pécheurs et mange avec eux !"

[3] Il leur dit alors cette parabole :

[4] "Lequel d'entre vous, s'il a cent brebis et vient à en perdre une, n'abandonne les 99 autres dans le désert pour s'en aller après celle qui est perdue, jusqu'à ce qu'il l'ait retrouvée ?

[5] Et, quand il l'a retrouvée, il la met, tout joyeux, sur ses épaules

[6] et, de retour chez lui, il rassemble à moins que ton « assemble » sans « r » soit volontaire, comme plus bas ? amis et voisins et leur dit : Réjouissez-vous avec moi, car je l'ai retrouvée, ma brebis qui était perdue !

[7] C'est ainsi, je vous le dis, qu'il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour 99 justes, qui n'ont pas besoin de se repentir.

[8] "Ou bien, quelle est la femme qui, si elle a dix drachmes et vient à en perdre une, n'allume une lampe, ne balaie la maison et ne cherche avec soin, jusqu'à ce qu'elle l'ait retrouvée ?

[9] Et, quand elle l'a retrouvée, elle rassemble amies et voisines et leur dit : Réjouissez-vous avec moi, car je l'ai retrouvée, la drachme que j'avais perdue !

[10] C'est ainsi, je vous le dis, qu'il naît de la joie devant les anges de Dieu pour un seul pécheur qui se repent."

 

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24 février 2012 5 24 /02 /février /2012 23:27

le bon berger ddmcanada.free.fr

Dans l’Evangile selon Luc au chapitre 15 verset 1 à 9

[1] Cependant tous les publicains et les pécheurs s'approchaient de lui pour l'entendre.

[2] Et les Pharisiens et les scribes de murmurer : "Cet homme, disaient-ils, fait bon accueil aux pécheurs et mange avec eux !"

[3] Il leur dit alors cette parabole :

[4] "Lequel d'entre vous, s'il a cent brebis et vient à en perdre une, n'abandonne les 99 autres dans le désert pour s'en aller après celle qui est perdue, jusqu'à ce qu'il l'ait retrouvée ?

[5] Et, quand il l'a retrouvée, il la met, tout joyeux, sur ses épaules

[6] et, de retour chez lui, il assemble amis et voisins et leur dit : Réjouissez-vous avec moi, car je l'ai retrouvée, ma brebis qui était perdue !

[7] C'est ainsi, je vous le dis, qu'il y aura plus de joie dans le ciel pour un seul pécheur qui se repent que pour 99 justes, qui n'ont pas besoin de repentir.

[8] "Ou bien, quelle est la femme qui, si elle a dix drachmes et vient à en perdre une, n'allume une lampe, ne balaie la maison et ne cherche avec soin, jusqu'à ce qu'elle l'ait retrouvée ?

[9] Et, quand elle l'a retrouvée, elle assemble amies et voisines et leur dit : Réjouissez-vous avec moi, car je l'ai retrouvée, la drachme que j'avais perdue !

Quelle joie de pouvoir être auditeurs de l’Evangile comme nous le sommes !

Quelle joie de pouvoir nous glisser dans ce groupe de publicains et de pécheurs  et comme eux s’approcher et écouter une parole où Jésus nous dit la valeur, le prix que nous avons à ses yeux.

Et oui, ces deux paraboles (comme le troisième bien connu, dite du « fils retrouvé ») nous disent d’abord le prix que nous avons aux yeux de Dieu.

Elles nous comparent à une brebis, une pièce d’argent et un enfant. Ces comparaisons disent toutes les trois à leur manière une richesse et  une valeur qui ne doivent pas se perdre et qui demandent de tout mettre en œuvre pour être retrouvées.

Et à chaque fois, cette valeur ou richesse est unique. Car pour Dieu, chacun, chacune de nous est sa brebis préférée, sa pièce précieuse, son enfant bien aimé !

 

Qu’il est meilleur le regard de Dieu sur nous si nous le comparons à celui que nous avons sur nous-mêmes ! C’est pourquoi l’Evangile est bonne nouvelle.

C’est pourquoi l’appel à la conversion est appel à changer notre regard. En fait, c’est faire un échange : renoncer au nôtre et accueillir celui de Dieu. Je suis sa brebis préférée, sa pièce précieuse, son enfant bien aimé et il n’a de cesse de me chercher, de me trouver et de me retrouver.

 

L’autre lieu de conversion est donc aussi un appel à transformer nos images de Dieu. Sont-elles en coïncidence  avec ce qui nous est révélé ici de Dieu ?

Dieu comme un berger qui court à ma recherche, qui me met sur ces épaules.

Dieu comme une femme qui allume une lampe pour me chercher sans se lasser.

Dieu comme un père qui fait la fête à l’enfant retrouvé que je suis.

 

Oui, c’est bien de bonnes nouvelles pour notre vie dont l’Evangile est porteur. Laissons-nous libérer par elles. Ce sont elles qui peuvent dilater notre cœur et transformer quelque chose en nos vies.

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5 février 2012 7 05 /02 /février /2012 18:57

« La vie de l’homme sur la terre est une corvée

Comme l’esclave et le manœuvre je n’y ai gagné que du néant »

(dans le livre de Job au chapitre 7 verset 1)

Voilà une déclaration qui nous plombe !

Et qui peut faire sombrer dans une déprime profonde.

 

Le fil rouge de ma réflexion est de comprendre cette détresse profonde et pour cela la remettre dans le contexte de son expérience :

Il dit cela après qu’il ait perdu : ses enfants, sa fortune et sa santé.

 

Et en plus, pour en rajouter à son malheur, ses amis lui disent que c’est de sa faute, que sa souffrance est la juste punition de son péché.

Donc tout perdu et en plus on lui dit qu’il a perdu l’amitié avec Dieu.

C’est vraiment le comble pour vous enfoncer dans la détresse.

 

Pourquoi ses amis se permettent-ils de lui dire cela ?

Ses amis s’appuient sur tout un courant de pensée pour qui la réussite, la richesse, la santé sont  des récompenses de Dieu pour celui qui mène une vie moralement bonne.

Et au contraire, l’échec, la pauvreté, la maladie sont des punitions de Dieu pour celui qui commet le péché

Nous savons que Job refuse cette explication et clame son innocence.

Nous savons que le livre de Job est exemplaire dans la Bible d’un autre courant de pensée qui refuse cette théorie de la rétribution.

 

Mais cela nous place devant une question redoutable.

Pourquoi la Bible dit-elle une chose et son contraire ? D’autant que ce n’est pas seulement sur cette question de la rétribution qu’il y a des positions en totale opposition.

Devant ce constat de divergences, de théologies différentes, on peut se demander : Qu’est-ce qui est vrai ? Qu’est-ce qui est parole de Dieu, inspiré par lui ?

Pourquoi dans cette Bible, y-a-t-il cette juxtaposition de positions inconciliables ?

Pourquoi,  in fine, les rédacteurs n’ont-ils pas pris position en ne gardant qu’une des positions ?

 

Parce que les auteurs bibliques  ont une conception particulièrement novatrice  de la vérité.

Non pas une vérité éternelle, anhistorique, monolithe, absolutisée,  mais une vérité qui se cherche dans les méandres de l’histoire humaine, qui s’approfondit  grâce à des crises, quand les réponses anciennes ne sont plus audibles, quand l’expérience vient les contredire de telle sorte  qu’elles ne sont plus satisfaisantes.

Et c’est bien ce qui se passe avec l’expérience vécue par Job : les faits viennent contredire la pensée dominante.

 

Il faut alors se remettre en route à la recherche d’une vérité qui ne peut pas s’arrêter  à un moment donné.

Les auteurs bibliques ont gardé les  réponses anciennes et nouvelles comme mémoire d’un cheminement de pensée, comme anamnèse d’une résolution d’une crise. Elles sont là toutes deux pour « apprendre à penser » à partir de « choses provisoires, imparfaites, contradictoires »

Et ce côté provisoire et imparfait est positif. C’est la part d’erreurs de ce provisoire et de cet imparfait qui peut faire entrer en crise la connaissance antérieure.

Parce que l’erreur et sa rectification font partie intégrante  de tout processus de connaissance  profonde et mûre de la vérité.

 

Le plan divin ne consiste pas à distribuer une information correcte une fois pour toutes, mais à faire avancer un processus éducatif où l’on apprend à apprendre, où l’on apprend à penser.

 

Cela nous amène à ouvrir les yeux sur Jésus. Il donne raison à Job, à son refus de la rétribution. Car lui est l’innocent injustement condamné. Il brise ainsi tout discours  qui met un lien entre souffrance et faute.

 

 

 

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14 janvier 2012 6 14 /01 /janvier /2012 23:34

Le livre de Judith a été écrit un siècle avant le Christ. Comme quelques autres livres bibliques, ce récit est fictif mais sa vérité est de l’ordre du sens : il veut montrer au peuple d’Israël que Dieu n’abandonne pas son peuple et lui donne des moyens de se libérer. Ici, ce moyen c’est la détermination d’une femme, son courage, sa prière. Il veut aussi montrer la légitimité de la résistance à l’oppression.

Nous pouvons méditer avec les chapitres 8 à 16 en continu. Et de nous arrêter sur les parties sélectionnées ci-dessous. C’est une autre manière de méditer. Mais pour chacune de ces parties, il s’agit toujours de regarder, d’entendre, de s’imprégner d’une parole qui, ici, est un appel à résister à l’inacceptable.

On peut méditer en découpant les chapitres 8 à 16 de la manière suivante :

 

Son quotidien : 8/1-9

La regarder dans sa vie quotidienne : être attentif-ve à ce qu’on dit d’elle : sa beauté, sa foi, la gestion de sa fortune, la simplicité de son vêtement, sa pratique du jeûne, son écoute du peuple et d’une décision politique à laquelle elle s’oppose.

 

Son discours : 8/10-36

Ecouter l’autorité de son discours, sa fermeté à dire ce qu’elle pense (« vous avez tort »). Ecouter son appel à la confiance en Dieu (« attendez avec patience le salut qu’il voudra bien vous accorder »).

Voir sa lucidité politique (« si nous capitulons, toute la Judée sera prise »).

Ecouter la conscience qu’elle a que le salut est de Dieu, mais passe par la médiation de nos actions (« la vie de nos frères dépend de la nôtre, et le sort du lieu saint est entre nos mains »)

Ecouter sa décision : elle ne se contente pas de parler, elle décide d’agir (« je vais faire quelque chose…le Seigneur se servira de moi »)

 

 

Sa prière : 9/11-14

Regarder ce qu’elle a compris de Dieu («Tu es le Dieu des humbles »)

Ecouter sa demande (« donne-moi la parole qui séduit… »)

Dans cette demande, regarder son projet de résister à l’inacceptable, résistance qui va prendre les armes. ( semblable à celle des résistants qui, pendant la seconde guerre mondiale, ont choisi de combattre par les armes le nazisme)

 

Son complot : 10 et 11

Regarder son stratagème pour s’approcher du chef de guerre ennemi, digne d’un roman d’espionnage ! (« Je viens pour lui donner des renseignements… »)

Ecouter son discours pour gagner la confiance de ce chef.

La réalisation de son plan : 12 et 13/1-16

Regarder l’intelligence avec laquelle elle exécute son plan.

L’éloge qu’on fait d’elle : 13/12-20  (« elle a risqué sa vie, elle a sauvé en faisant de son mieux les œuvres de Dieu »)

 

La libération : 14 et 15

 

Son cantique : 16

Reprendre les mots de sa prière en 1-2 et 13-16

 

 

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15 décembre 2011 4 15 /12 /décembre /2011 23:58

Suite et fin de l'article qui présente l'interprétation de la bibliste Sandra Schneiders.

5-L'appropriation transformante

Le point culminant d'une herméneutique intégrale (c’est à dire non exclusive), c'est l'appropriation transformante.

Quel monde ce texte invite-t-il à habiter ?

Quel monde porteur de vie pour des femmes et des hommes?

Quelle action transformante sur le lecteur, la lectrice,  ce texte a-t-il ?

Non un changement volontariste d'attitude mais quel effet cela a d'interpréter ainsi ? C’est du même ordre que l'effet que peut produire une pièce de théâtre : Il se fait une transformation sur le-la spectateur-trice du fait même d'avoir regarder cette pièce.

Cette transformation après coup peut être explicitée et verbalisée et aboutir à des décisions.

Ici ce texte fait entrer dans un monde inclusif de l'autre :

Ceux-celles qui étaient rejeté-es comme hérétiques : les samaritains

Avec Jésus personne n'est exclu, c'est bien d'ailleurs la finale : « tu es le sauveur du monde ». Inclusif de l'autre aussi qu'est le féminin.

Cette femme est représentante universelle de l'autre méprisé-e, mis-e à l'écart, tout au long de l'histoire et partout dans le monde.

Elle est accueillie avec respect, elle est invitée à donner pour recevoir un don plus grand encore, elle est entendue dans ses interrogations et ses objections, elle est interlocutrice d'un dialogue profond de foi, elle devient disciple apôtre, associée à la mission d'évangélisation.

Le lecteur-la lectrice est donc initié-e à un monde inclusif.

La scène avec les disciples est là pour disqualifier « tout oui mais » qui voudrait justifier l'exclusion pour des raisons ethniques, morales ou sexuelles

Le-la lecteur -trice fait l'expérience aussi que ce nouveau monde n'existe pas encore.

Il-elle peut le voir dans l'expérience quotidienne mais aussi dans le texte même qui contient du déjà là de l'inclusion mais aussi du pas encore.

Le pas encore dans le texte même c'est le sexisme latent de la métaphore idolâtrie /adultère En effet cette métaphore joue toujours dans le sens d'une assimilation Dieu/masculin /fidèle et l’Humanité/féminin/infidèle.

Il y a interpénétration dans le texte même de 2 mondes : celui que Jésus inaugure et le monde dans un des sens de ce mot a en Jean : monde pécheur, non encore transformé.

Ou plutôt un seul monde , complexe qui est déjà là et pas encore.

C’est une manière de comprendre Jésus qui prie pour que nous ne soyons pas sorti-es du monde mais gardé-es du mauvais.

Le-la lecteur-trice participe à ce monde où l'inclusion est à l’œuvre mais où le mal sape le règne de Dieu.

L'oppression, la discrimination sont enracinées dans le langage et les métaphores les plus sacrées.

 

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14 décembre 2011 3 14 /12 /décembre /2011 17:10

CatViaLatinaSamaWomanWellCette article est une présentation d’un chapitre du livre de

Sandra M. Schneiders, Le texte de la rencontre paru aux Editions du Cerf dans la collection: “cogitatio fidei” n°161.

 

Dans ce chapitre, elle donne une interprétation de l’Evangile de la samaritaine ( Jean 4, 1 à 43)

 

Son  livre est  une recherche d’herméneutique biblique, c’est à dire portant sur l’interprétation de la Bible. Une Interprétation intégrative et transformante : quelle est la vérité intrinsèque au texte pour des lecteurs-trices croyant-es et disciples d'aujourd'hui?

Quel univers se dégage de ce texte pour inviter lecteur et lectrice à une transformation en y participant?

 

1-Approche historique: Ce n’est pas un événement de la vie de Jésus. Car c’est en contradiction avec Lc 9/52 où on nous dit que les samaritains ont refusé de recevoir Jésus et avec  Mt 10/5  où il interdit aux disciples d'aller en Samarie.  Ac 8 rapporte ce qui semble être une 1ère  mission. C'est donc un texte de légitimation de la communauté chrétienne samaritaine qui indique leur place importante dans la communauté johannique et leur volonté d'égalité entre juifs et samaritains. Le dialogue de Jésus avec cette femme fait écho aux controverses de ces deux groupes : oui, le salut vient des juifs mais il s'agit maintenant pour tous d'adorer en esprit et vérité.

2-Approche littéraire C’est un récit typique, sa narration se conforme à un modèle biblique reconnu, la rencontre d’une femme et d’un homme :

-Gn24/10-61 pour Rébecca et Isaac;

-Gn29/1-20 pour Rachel et Jacob;

-Ex2/16-22 pour Cippora et Moïse;

-la mention du puits de Jacob : Jésus déjà identifié à un époux à Cana qui procure le bon vin;  désigné comme époux par Jean-Baptiste Jn3/27. Dans ce contexte, on peut lire ce récit comme Jésus, nouvel époux qui vient réclamer la Samarie comme son épouse.

Thème d'un mariage et toute une symbolique de fécondité : puits, eau, vases, champs fertiles, semence, moisson. En contraste avec la rencontre avec Nicodème qui vient de nuit, ici nous sommes en plein midi et cela dit l’accueil de la révélation et la réussite de l’évangélisation par son témoignage.

3-La pointe théologique du récit : la mission

La conversation des disciples avec Jésus porte sur la mission (v31-38).  La faim de Jésus a été comblée par cette conversation et ce qui en est suivi : le départ de cette femme pour évangéliser. La Samarie est ce champ pour la moisson. Le résultat, c'est la venue à Jésus des gens de la ville, grâce au témoignage de la femme (v39) et qui le fait reconnaître comme sauveur. Donc la question importante est celle-ci: quelle est l'identité et quel est le rôle de la Samaritaine dans ce récit missionnaire ?

4-Identité et rôle de la samaritaine, une apôtre-disciple:

La plupart des commentaires sont des banalisations : image d’une femme qui est en faute dans sa vie sexuelle. Cette banalisation a pour effet de voir les hommes seuls ayant reçu charge par Jésus de porter l'évangélisation. Cette femme est un personnage symbolique, une « figure représentative». Comme le disciple bien-aimé, l’officier royal, le paralysé, l’aveugle-né qui n'ont pas de nom pour pouvoir représenter des collectivités sans perdre leur particularité. Ici elle symbolise

-les samaritains qui ont reçu la foi au Christ

-le nouvel Israël qui est donné à Jésus-Epoux.

 

D'un bout à l'autre du dialogue nous sommes dans le domaine de la foi et donc l'histoire des cinq maris doit être lue dans le même registre de foi.. Les questions sur la foi que pose la samaritaine ne sont pas là pour masquer son passé douteux. Elle l'interroge sur son infraction à la tradition juive (s'adresser publiquement à une femme et vouloir utiliser un ustensile samaritain) Elle l'interroge sur sa prétention à se faire plus grand que Jacob. Ensuite l'ayant reconnu comme prophète, elle l'interroge sur le lieu du culte. Elle mène une enquête sur l'identité de Jésus dont l'enjeu est de savoir s'il est le Messie. Cela permet à Jésus de révéler le vrai culte qui est en esprit et vérité. Cela la confirme dans son intuition qu'il est le Messie. Il la confirme mais en lui révélant qu'il est plus que le Messie attendu, qu'il est « Ego eimi », L'appellation que les samaritains préfère pour parler de Dieu, car issue de la tradition mosaïque Ex3/14 ( C'est le 1er emploi de la formule révélatoire « Je Suis » en Jn. ) Nous sommes donc en face d'un examen théologique rigoureux qu'une femme fait passer à Jésus. C'est dans ce contexte et non hors de lui qu'il faut interpréter la question des cinq maris. Cette question est partie prenante de cet échange hautement théologique. Nous sommes en plein cœur de la symbolique chère aux prophètes : l’idolâtrie conçue comme un adultère. Infidélité du peuple à son époux qui est Dieu. Le signe de cette infidélité pour la Samarie était l'acceptation du culte aux faux dieux de cinq tribus étrangères (cf : 2R17/24-41.) Son culte était souillé par ces faux cultes symbolisés ici par les cinq maris. Et donc le mari qu'elle a, c’est à dire le Dieu de l'Alliance, n'est pas vraiment son mari selon une plénitude d'Alliance. C'est pourquoi Jésus dit que les juifs connaissent Dieu alors que les samaritains, non. « Pas de mari ». C'est vrai, Samarie n'a pas un mari au sens où Dieu serait son unique. 

Seule cette interprétation symbolique peut expliquer ce texte d’autant plus que l'interprétation littérale ne tient pas car il est d'une haute improbabilité qu'un juif ou un samaritain veuille épouser une femme cinq fois déjà répudiée. Quand elle dit qu'elle voit qu'il est un prophète ce n'est pas la reconnaissance d'un savoir surnaturel sur sa vie privée mais parce que les cinq maris, c'est une dénonciation prophétique classique des faux cultes idolâtres. (Os 2/4).  Le vrai culte sera caractérisé par un culte en esprit et vérité.  Du coup cela lui permet de reconnaître en Jésus le Messie annoncé, celui qui annoncera toutes choses. C'est de cela qu'elle témoigne : « ce qu'il m'a dit » étant une auto-identification au peuple entier. Jésus est venu pour séduire ce peuple en vue d'une fidélité complète à l'Alliance. Cela n'a rien à voir avec la vie sexuelle d'une femme mais avec la vie d'alliance d'une communauté.

 

Dialogue d'une rare intensité théologique. Un vrai dialogue, unique dans l'Évangile, où cette femme est une authentique partenaire et pas seulement un faire- valoir. Une révélation progressive à mesure que sa confiance en lui progresse. L'étonnement des disciples en le voyant parler à une femme peut refléter le débat sur le rôle des femmes dans la communauté johannique et l'insertion de ce passage dans le texte peut être due à la volonté de montrer que Jésus voulait que les femmes aussi participent à l'évangélisation. C'est pourquoi il a ajouté un détail qui est parallèle à l'appel des apôtres dans les synoptiques, le fait de quitter leur bateau. Ici « abandonner » sa cruche pour se consacrer à l'évangélisation. L'abandon de la cruche est semblable à l'abandon des filets, du bureau de douane, pour suivre Jésus et devenir apôtre. Pourquoi cet abandon de la cruche n’a-t-il jamais été interprété au même titre que les autres abandons ?  

Jésus cherche quelque chose auprès de cette femme et cela semble étonnant. Cela traduit le trouble des hommes de la communauté johannique de ne pas être ainsi les seuls associés à la mission de Jésus. L'auteur insiste en montrant que Jésus s'est fort bien passé d'eux. Cette femme lui a apporté ce qui peut satisfaire sa faim de faire la volonté de Dieu. La mission de la Samarie est remise entre les mains de cette femme,  mission dont ils ne sont pas les initiateurs et ne seront que les moissonneurs.

 

On peut légitiment penser qu'il y avait des femmes théologiennes, apôtres mais que cela était tellement à contre courant de l'ethos ambiant que cela provoquait des tensions.

Ce texte permettait de légitimer la participation de femmes à des rôles que des hommes croyaient être seuls à pouvoir remplir. D'autant plus, et c'est un cas unique dans l'Evangile, elle est la première et la seule dont la parole a permis à un groupe tout entier de se convertir.

Elle réalise ce que Jésus dit en Jn 17/20 : « ceux qui croiront en moi grâce à leur parole » Son ministère de la parole a été efficace.

L'évangéliste a présenté sous forme narrative la mission auprès des samaritains attribuant à Jésus lui-même l'initiative de la mission en Samarie et à une femme le travail d'évangélisation. Certaines interprétations ont voulu minimiser le travail de cette femme et donc la volonté de Jésus d'en faire une apôtre en insistant sur le fait que ce n'est pas sur sa parole que les samaritains ont cru mais sur celle de Jésus.

Ce qui est curieux, c'est que le même raisonnement n'est pas fait quand il s'agit d'hommes. Il est évident que si des gens sont amenés à Jésus par un-e disciple,  la foi plénière ne vient que grâce à la parole de Jésus lui-même.

 

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27 novembre 2011 7 27 /11 /novembre /2011 20:56

 

VEILLER

Il est des temps de ce monde ou de notre propre histoire, où il fait nuit : nuit de la souffrance, nuit de la solitude, nuit de la foi…

Nuits en attente de lumière, de tendresse, de paix.

Ces nuits nous acculent à un choix :

Ou bien baisser les bras, renoncer.

Ou bien choisir de croire malgré tout, choisir de vivre, choisir de veiller pour attendre la fin de la nuit.

Car elle viendra !

Heureux celui, celle, qui aura veillé, attendu, cru.

Elle- il, est veilleur d’espérance.

Pour veiller dans les nuits de ce monde ou de sa vie personnelle, le disciple de Jésus, a dans le cœur une lampe qui brille et perce la nuit :

ce monde, nos vies sont définitivement sauvées en lui, définitivement aimées.

Déjà sa vie a vaincu nos morts par sa résurrection.

Alors, veiller, ce sera :

Savoir reconnaître sa victoire déjà là dans les plus petites choses,

comme ce qui est en train de naître et s’engager de toute ses forces à la suite de Celui qui a ouvert le chemin.

 

PREPARER 

Préparer son cœur pour que le Christ y fasse davantage sa demeure.

Il est venu un jour du temps pour que chacun puisse l’accueillir au plus profond de sa vie et la transforme.

Préparer c’est offrir toute faiblesse, toute lâcheté, toute souffrance, toute nuit et demander à Jésus de faire sa demeure en elles.

Préparer, c’est ouvrir ma porte pour Dieu y vienne.

Préparer, c’est attendre de lui seul, la justification de ma vie.

« Préparer les chemins du Seigneur » clame le prophète Isaïe.

Ouvrir des chemins en son cœur. Préparer, ce n’est pas s’agiter, c’est plutôt, s’arrêter, se reposer, offrir un espace à Dieu, ouvrir un espace pour entendre la bonne nouvelle qu’il brûle de partager avec moi.

Oui, préparer son cœur, c’est consentir à sa présence, la désirer.

Désirer sa présence, désirer son salut.

Notre monde et nos propres vies ont tant besoin d’être sauvé !

 Alors, Jésus se sentira invité, attendu et n’aura pas crainte de nous déranger !

 

SE REJOUIR

A cause de Jésus Christ !

Me réjouir de le connaître, de l’aimer.

Peser avec amour tout ce que ma foi me donne.

Que serai-je sans lui ?

Ma vie ne vient pas du hasard mais vient d’un désir aimant de Dieu.

Ma vie ne court pas vers le néant mais s’achemine vers une plénitude d’existence.

Je suis aimé-e.

Se réjouir du changement de regard que ma foi opère : changement de regard sur le monde, les autres et moi-même !

Un monde, les autres, moi-même…à aimer.

Se réjouir de cette grâce donné, qui est tâche confiée.

Se réjouir de cette tâche confiée qui est grâce donnée.

Se réjouir des plus petites choses du quotidien avec un regard exercé à y découvrir les miettes de charité qui y sont cachés.

 

ECOUTER

Un jour, Jésus dira bienheureux ceux qui écoutent sa parole et qui la gardent.

Bonheur plus grand que celui d’être sa mère !

Car en fait, Marie a pu porter Jésus en son sein parce que d’abord elle a écouté.

Ecoute attentive et discernante.

Marie n’écoute pas n’importe qui et ne fait pas confiance n’importe comment.

Elle discerne pour savoir si cette parole lui vient bien de Dieu.

Vérification indispensable pour engager une confiance totale.

Ecouter Dieu, c’est lui faire confiance, croire ce qu’il me dit pour  pouvoir m’y engager.

Ecouter Dieu, c’est croire que sa seule et unique volonté c’est le triomphe de la vie sur toutes les formes de mort.

Dieu ne me veut que du bien, du bon, du beau, du vrai.

Je peux donc en confiance, m’y abandonné.

« Qu’il me soit fait selon ce que tu dis ! »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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17 novembre 2011 4 17 /11 /novembre /2011 23:55

Lytta Basset montre par son interprétation du chapitre 2 et 3 de la Genèse, qu’aucun texte biblique n’est écrit avant le péché ! Même un texte qui parlerait d’un temps avant le péché ! Elle écrit :

« L’auteur du texte parle à partir du monde où il vit, un monde indissociable du mal, un monde où le mal va tellement de soi qu’on ne le mentionne pas, pas plus qu’on ne mentionne le non respect dont la femme est l’objet. En effet, le non-respect de la femme dans le texte suffit à attester que le mal est là dès les origines, indépendamment du drame du jardin. »

Beaucoup de femmes, aujourd’hui dans le monde, peuvent voir dans Gn 2-3, une situation qui malheureusement est la leur.

Ce principe herméneutique rejoint celui de Paul Ricoeur dans sa si belle interprétation du péché originel :

« Le mythe adamique révèle en même temps cet aspect mystérieux du mal, à savoir que si chacun de nous le commence, l’inaugure…chacun de nous aussi le trouve, le trouve déjà là, en lui, hors de lui, avant lui. Pour toute conscience  qui s’éveille à la prise de responsabilité, le mal est déjà là ; en reportant sur un ancêtre lointain, l’origine du mal, le mythe découvre la situation de tout homme : cela a déjà eu lieu. »

Pour lui, ce texte n’explique rien mais exprime l’expérience humaine. Il est parole de Dieu en tant que :

«Pouvoir révélant concernant la condition humaine dans son ensemble …Quelque chose est découvert, descellé, qui sans le mythe serait resté couvert, scellé. »

 

Cette fonction du mythe qui découvre et descelle peut se comprendre de manière vivante. Ce n’est pas une fois pour toutes qu’il permet de découvrir et de desceller. Sa fonction de découverte peut être aujourd’hui neuve et nous ouvrir à une compréhension encore jamais mise à nue.

C’est à cela que se livre Lytta Basset en disant que le mal est à l’intérieur du texte même. Ceci, non pas pour justifier la hiérarchie des sexes, mais pour la dénoncer et permettre au texte d’être un révélateur du mal au féminin. En ce sens il peut révéler du neuf, dévoiler du caché, desceller ce qui était encore scellé.

 

Ce mal, Lytta Basset le décline en plusieurs points :

-l’Adam masculin conçu comme le seul interlocuteur de Dieu (dans le texte, Dieu ne s’adresse à la femme que pour lui signifier sa faute).

-La femme est faite pour l’homme: elle est tirée de lui, faite pour lui, référée à lui, son être ne se conçoit qu’en fonction de l’humain masculin. Etre la femme d’un homme est sa vocation et sa raison d’être. 

-L’Adam masculin est associé au pouvoir créateur de Dieu pour qui nommer, c’est faire exister. Les animaux sont nommés selon lui et pas selon elle. Sa vision et sa nomination masculine sont universelles sans avoir besoin de celle de la femme. L’Adam masculin proclame le nom de la femme comme il l’a fait pour les animaux, donc exerçant un droit de souveraineté sur elle.

-Quand, dans le texte, la femme apparaît seule (non référée, on pourrait dire « déliée » du masculin,) cela se révèle une catastrophe.

 

En quelques versets est donc décrit un sexisme de tous les temps : femme sensuelle, jalouse, déficiente et un Adam qui se croit seul : les quatre « je » de Gn3/10. Ainsi dans ce jardin règne déjà le mal sous la forme de la  non-considération de la femme comme personne à part entière. Ce monde du texte est de tous les temps. Cette exclusion du féminin, cette dévalorisation, cette instrumentalisation sont exemplaires de toutes les formes d’exclusion de l’autre.

 

Mais alors comment ce texte peut-il être Parole de Dieu ? Il l’est au sens où il révèle un mal occulté. Si bien occulté qu’il faut attendre vingt siècles pour qu’une théologienne comme L.Basset puissent l’exposer.

Pourquoi aujourd’hui peut-on faire ces lectures tellement différentes de celles qui ont eu cours jusqu’à maintenant ?

 

Une des réponses possibles consiste à dire que le monde du lecteur de ce  texte aujourd’hui n’est plus le même que celui de son auteur et des commentateurs anciens. Expliquons cela avec la pensée  de Daniel Marguerat et Yvan Bourquin. En amont d’un texte, il y a le monde expérimenté par l’auteur et en aval, le monde où vit le lecteur.

« Pour que la lecture soit une authentique expérience, il faut que le texte ne coïncide pas en tous points avec le monde du lecteur. Si monde du récit et monde du lecteur sont superposables, alors la lecture ne dégage qu’un effet de miroir. Le lecteur se retrouve lui-même. En revanche, plus la distance est forte entre récit et lecteur, plus le retour au monde du lecteur sera fécond d’interrogation…

Contre toute appropriation immédiate du texte, il faut insister avec Ricoeur, sur l’altérité comme dimension fondamentale du rapport au texte…Cette remarque est de grande importance pour la lecture biblique. Elle fait prendre conscience que l’éloignement (historique, culturel) des textes bibliques, s’il est un handicap pour une actualisation immédiate, fonctionne en réalité comme condition de possibilité d’une authentique quête de signification. Il faut postuler une étrangeté du texte face au monde du lecteur qui fait de la lecture une opération de dé-contextualisation et de re-contextualisation ».

 

Jusqu’à récemment, ce texte, en ce qui concerne le rapport du masculin et du féminin,  a fonctionné comme miroir : le monde patriarcal du lecteur était le monde patriarcal de l’auteur, aucune distance, l’un approuve l’autre et réciproquement !

C’est seulement la situation de l’écart qui peut être  la nôtre maintenant,  qui peut faire surgir un questionnement nouveau, une compréhension nouvelle.

Ce miroir a fonctionné pendant vingt siècles où notre question de l’Adam masculin n’en était pas une mais était une évidence, une certitude et une justification de subordination du féminin au masculin.

 

L.BASSET, Guérir du malheur, Albin Michel, 1999, p 267

P.RICOEUR , Le conflit des interprétations, Paris, Seuil, 1969, p 280

P.RICOEUR, idem p279

L.BASSET, Guérir du malheur, Albin Michel, 1999, p 268 à 272

D.MARGUERAT et Y .BOURQUIN, Pour lire les récits bibliques, la Bible se raconte, initiation à l’analyse narrative Cerf-Labor et Fides-Novalis, 2002, p. 180 et 181

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