Une des notions du christianisme à revisiter pour le monde d’aujourd’hui, est celle du salut. Comme je l’ai déjà écrit sur ce blog, le discours chrétien a véhiculé une image du salut qui se réduisait le salut à l’accès à un paradis. Sauvé, vous allez au paradis. Perdu, vous allez en enfer. Par exemple, tout le débat au 16ème siècle entre Luther et Rome portait sur ce salut-là: sauvé grâce à la foi ou grâce aux œuvres?
Réduire ainsi le salut à cette question est déjà problématique en soi car cela sous-entend une image de Dieu qui met à l’épreuve l’humain : la vie sur terre comme un examen qui se termine par la réussite ou l’échec.
Dieu n’est-il pas plus grand que cela ?
Ne peut-on pas penser qu’au-delà de l’énigme qu’il y ait de l’être plutôt que rien, Dieu est le garant d’une réussite totale de tout ce qui est, par un processus d’enfantement tel que Paul le découvre ( Rm 8/22) et qui ne peut que réussir ?
Cette réduction, également, a eu pour conséquence un désintérêt du monde alors que le salut concerne d’abord le présent des vies humaines. Jésus, dans sa vie a sauvé des vies bien concrètement et aujourd’hui, le seul salut qui soit requis c’est de faire comme lui : guérir, faire grandir, nourrir, pacifier, avoir de l’estime, relever, …en un mot humaniser. C’est un salut qui est entre nos mains, quelque soit nos croyances ou nos incroyances religieuses, nos convictions diverses.
Jésus nous sauve donc en nous indiquant un chemin de vie pour nous et pour les autres. Et nous avons besoin de la révélation de ce chemin. Beaucoup le vivent sans le connaitre mais le connaitre est infiniment précieux.
Mais le salut, c’est aussi
1-Se découvrir aimé-e
Quand je dis cela, pour moi, c’est l’essentiel du christianisme.
La découverte que Dieu nous aime et qu’ainsi nous sommes aimé-es.
Je ne sais pas comment l’exprimer, cela a mis au cœur de ma vie, comme une sorte de sécurité : beaucoup de choses peuvent s’écrouler autour de moi, mais Son amour pour moi, ça c’est solide, ça tient, même si je n’en ai plus conscience : Il continue de m’aimer comme Il le fait pour chacun de nous.
Dieu est un ami qui ne vous manquera jamais.
Si on se sait aimé-es tel-le qu’on est avec ses qualités et ses défauts, avec son passé et son présent, on va pouvoir peu à peu s’accepter soi-même.
Déjà, tel-les que nous sommes, nous sommes aimables aux yeux de Dieu.
On va peu à peu être délivré-es de la sévérité avec soi-même, de la mauvaise culpabilité, de la jalousie, du ressentiment, du jugement des autres.
En disant cela, je ne dis pas qu’on vit toujours « cui-cui, les petits oiseaux », ni que cela nous protège des souffrances de la vie, mais qu’on les vivra autrement.
Se savoir aimé-es par Dieu, n’est pas une assurance contre la souffrance, mais on n’est pas seul, l’amitié de Dieu est là, à la fois, cela ne change rien et cela change tout, car on n’est pas seul.
2- Vivre une vie qui a du sens
J’ai connu les deux situations : sans la foi et avec la foi.
Sans la foi : ça veut dire que notre vie est un instant dans l’immensité du temps, une poussière dans l’immensité de l’espace, le fruit du hasard et que nous allons vers le néant.
Il y a une angoisse profonde qui nous habite toutes et tous, souvent cachée.
La foi nous dit autre chose que ça :
Elle nous dit que ne sommes pas le fruit du hasard et que notre destination finale n’est pas le néant.
Elle nous dit que nous sommes le fruit d’une volonté aimante de Dieu et que nous sommes faits pour une vie éternelle.
Notre origine est divine et faite pour un amour qui n’aura pas de fin.
Vivre sa vie en sachant cela, nous établit dans la paix : nous sommes depuis toujours et pour toujours dans les mains aimantes de Dieu.
Cela ne veut pas dire encore une fois que tout est facile ; le croyant connaît aussi des peurs, des angoisses, mais en s’appuyant sur sa foi, il est délivré de l’angoisse du néant qui est à l’opposé de la paix.
3-Se réjouir de soi
En accueillant la foi qui m’était proposée par le christianisme, j’ai appris que chacun-e de nous a une valeur infinie, ce qui change son regard sur soi et sur les autres.
La foi me dit que nous sommes capables de bonté, de vérité, de justice, de liberté, parce que Dieu nous a faits comme Lui, à Sa ressemblance. Ça change profondément l’image que j’ai de moi.
Dieu a d’abord une image positive de moi, d’abord, surtout et j’ai envie de dire toujours. De moi et donc des autres.
« Merveille que je suis » dit le psaume 139.
Assez étonnant tout de même ! Grâce à Dieu, je peux m’accueillir comme un cadeau, m’accueillir dans la confiance, sûre de moi grâce au regard positif de Dieu sur moi.
C’est comme un contre poison du mépris de soi.
Mais cela fonde aussi la lutte contre toute forme d’injustice, de discrimination, de pauvreté, de racisme, de sexisme, parce que tout homme, toute femme a valeur infinie.
4-Expériementer une amitié
Il y a dans notre vie un allié, toujours de notre côté, jamais contre nous, toujours pour nous. Cette amitié que Dieu nous porte, elle nous est prouvée dans l’existence de Jésus. Cela est facteur de paix. Cela m’établit dans la paix en me montrant un Dieu avec nous pour lutter contre le mal, avec nous pour que la vie l’emporte.
Dieu connaît nos peurs, c’est pourquoi, il y a comme un refrain qui parcourt toute la Bible et que Jésus reprend : « n’ayez pas peur…la paix soit avec vous ».
Ne pas s’habituer à l’inouï de notre foi chrétienne.
5-Guérir des fausses images de Dieu
Grâce à Jésus, je peux guérir peur à peu de fausses images de Dieu. Par exemple : Le dieu qui se cache au coin de la rue pour me prendre en flagrant délit de faute ; Le dieu voyeur à qui rien n’échappe pour mieux m’accuser ; Le dieu fatalité qui a écrit sur son grand livre ce que je dois faire, sinon ce sera le malheur pour moi ; Le dieu paratonnerre, qui moyennant quelques sacrifices, me protégera des souffrances de la vie ; Ce dieu puissant qui impose sa loi de fer etc…
On peut allonger la liste, les exemples donnés sont des caricatures, mais nous n’en sommes pas indemnes et elles peuvent s’insinuer en nous sans qu’on y prenne garde.
Le Christ guérit peu à peu de ces fausses images, en le regardant :
ce vrai visage de Dieu qui Se donne à voir dans la fragilité de l’enfant de Noël, dans la charité, le respect, la liberté, la miséricorde de cet homme Jésus, le vrai visage de Dieu qui Se dit par la Croix : Dieu souffrant, et aimant jusqu’au bout.
L’Eternel qui est Dieu entre dans notre histoire en se faisant petit enfant et connaît la souffrance et la mort sur la Croix.
C’est une révolution de l’image de Dieu, c’est une subversion, une contestation radicale de nos images spontanées, de nos fausses images. Dieu qui nous aime le premier, qui nous rejoint dans notre histoire, qui se fait petit, vulnérable, à la merci de tous, ayant besoin de tous, qu’on peut prendre dans ses mains, dont on peut faire n’importe quoi, fragile.
6-Agir selon des chemins de vie
En regardant Jésus et en mettant nos pas dans ses pas, j’ai l’assurance d’un chemin de lumière, de vérité et de vie qui se décline dans une très longue liste :
Amour, pardon, miséricorde, confiance, espérance, don, fidélité, liberté etc.
En Jésus, je possède l’image réussie de notre humanité, l’image accomplie, la plénitude de notre humanité, l’homme dans sa vérité donc ce vers quoi je peux tendre si je veux réussir ma vie, mais donc aussi l’assurance que c’est possible, parce que Jésus a inauguré une autre logique qui est vrai chemin d’humanité. Avec la force qu’Il nous donne, c’est possible de vivre comme Lui.