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21 mars 2023 2 21 /03 /mars /2023 09:54
Le discours officiel de l’Eglise catholique romaine est néfaste pour les femmes-2

Voici la suite d’ extraits de mon livre : masculin-Féminin. Décryptage d’une encyclique.

J’ai analysé l’encyclique mulieris dignitatem de Jean-paul II en montant les quelques aspects positifs mais surtout en quoi cela reste un discours néfaste pour les femmes.

On peut se procurer mon livre en le commandant à la FNAC

https://www.fnac.com/a9912049/Michele-Jeunet-Masculin-Feminin-Ou-en-sommes-nous

Néfaste pour les femme de mettre le masculin du côté du divin et le féminin du côté de l’humain

La lettre encyclique met le masculin du côté du divin et le féminin du côté de la créature humaine. Pour étayer cette idée fondamentale, la lettre s’appuie sur la permanence biblique à présenter Dieu comme un époux et Israël comme son épouse dans l’Ancien Testament. Pour le Nouveau Testament, la lettre s’appuie sur la présentation que Jean-Baptiste fait du Christ comme époux et sur le fait que le Christ lui-même se présente ainsi en Marc, chapitre 2 versets 19 et 20. C’est un fait scripturaire indéniable. Mais il peut être interrogé et interprété…

Dans une société marquée par une « tradition qui était discriminatoire à l’égard des femmes »[1], Dieu créateur, sauveur, tout puissant ne pouvait être dit qu’au masculin de l’époux et la femme ne pouvait être pensée  que dans sa condition seconde, dépendante, pour dire la dépendance de l’humain à son Dieu.

Dans le cadre d’une nouvelle anthropologie qui rétablit l’égalité, il n’y a plus de raison de faire du féminin le symbole de l’épouse, ni d’assimiler Dieu à l’époux. Dans une anthropologie où hommes et femmes sont égaux, la symbolique du Christ-Epoux ne devrait plus être utilisée comme symbole du masculin face au féminin…

Continuons de regarder  avec précision le numéro 25 du chapitre 7 de la lettre encyclique qui se penche à nouveau sur Ephésiens 5.  Mais ici, c’est  pour en dégager des principes malheureux pour les femmes : l’amour de Dieu pour son peuple, semblable à celui d’un époux, exprimerait la qualité sponsale de cet amour qui ne pourrait être que masculine…

Quelle serait la caractéristique " féminine"  de l'épouse ? C’est le fait d’accueillir comme un don l’amour du Christ rédempteur…

Quelle serait la caractéristique de l’époux ? C’est le fait d’aimer le premier. Un époux qui, en s’incarnant, est devenu vrai homme au masculin. « Le symbole de l’époux est donc du genre masculin ».[2] C’est par ce symbole masculin que Dieu exprime son amour.

L’argumentation repose sur un présupposé non dit : une représentation de l'homme masculin comme celui qui aurait l’initiative, qui aimerait et donnerait  le premier, et une représentation du féminin qui reçevrait et ne pourrait donner qu’en réponse…

Mettre le masculin du côté de l’initiative et le féminin du côté de l’accueil, c’est revenir au vieux schéma du masculin premier et du féminin second..

Ce qui peut être questionné au niveau de la symbolique, ne peut l’être au niveau du réel de la masculinité de l’homme Jésus. Mais quel est le sens de cette masculinité ? Elle n’a pas un sens au niveau de la Révélation et de la Rédemption. Il n’est pas de nécessité de salut qu’il en soit ainsi. Et surtout, ce n’est pas  pertinent pour déterminer une identité, une vocation, des rôles différenciés du féminin et du masculin.[3]

Néfaste de faire de Marie l’« essence »  du féminin

Voici ce que dit la lettre encyclique :

La plénitude de grâce accordée à la Vierge de Nazareth, en vue de sa qualité de théotokos, signifie donc en même temps la  plénitude de la perfection de ce qui est caractéristique de la femme, de ce qui est féminin  [4]  En Marie « on retrouve la femme  telle qu'elle fut voulue dans la création et donc dans la pensée éternelle de Dieu, au sein de la très sainte Trinité. Marie est le nouveau commencement de la dignité et de la vocation de la femme, de toutes les femmes et de chacune d'elles… [5]

Faire de Marie le prototype de la femme, le commencement de sa dignité et de sa vocation, pose question sur plusieurs points.

D’abord en mettant ainsi Marie, de manière si forte du côté des femmes, c’est priver les hommes masculins de ce modèle comme modèle d’humanité.

Ensuite si Marie est l’archétype des femmes, c’est les priver du Christ comme archétype de leur humanité.

Et quel serait l’archétype des hommes masculins ? Le texte y répond de manière implicite en mettant le masculin du côté du Christ.

Néfaste de mettre le masculin mis uniquement du côté du Christ

Le Christ et Marie sont des modèles pour tout humain qu'il soit femme ou homme. Bien sûr le sexe de Marie est féminin et le sexe de Jésus en son humanité est masculin. Mais la foi a tenu que l'Incarnation assumait tout l'humain. C'est un enjeu de salut, selon l'adage classique que ce qui n'est pas assumé, n'est pas sauvé.[6] Le credo nous fait dire : homo factus est et non pas vir factus est. Il faut donc penser qu'en assumant la nature humaine sous sa limite inévitable d'un sexe et non de l'autre, ce sont les humains des deux sexes qu'il assumait et sauvait… 

Au n° 11 de la lettre, le fait de situer aussi Marie modèle du féminin, sans faire du Christ aussi le modèle des femmes, réintroduit une hiérarchie qui peut être légitimement contesté y compris au niveau de sa justesse doctrinale.

Par l'incarnation c’est la nature humaine qui est assumée, ce qui fait que les femmes, comme les hommes, sont uni-es à lui. Par le baptême, des êtres humains, hommes et femmes deviennent d'autres "Christ", sont configurés à lui.[7] On peut donc contesté fortement  que cette dimension baptismale qui configure au Christ les femmes comme les hommes soit  absente de cette lettre encyclique.


[1] MD 12

[2] MD 25

[3] A ce sujet, voir E.A.JOHNSON, "La masculinité du Christ", Concilium, n°238, p.148-151, article reproduit dans B.CHENU et M.NEUSCH, Théologiens d'aujourd'hui, vingt portraits, Paris, Ed.Bayard/Centurion, 1995, p 91-96.

[4] MD 5

[5] idem

[6] ST GREGOIRE DE NAZIANCE. Ep. Ad Clédonium, Ed Migne, Patrologie Grecque XXXVII, 181c.

[7] 1 Co 12, 13 ; Ga. 3, 19

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