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11 novembre 2011 5 11 /11 /novembre /2011 20:07

 

Pour remplacer le monothéisme monarchique, il faut une doctrine théologique positive de la liberté. Le fondement de l’athéisme moderne, c’est la conviction qu’un Dieu régnant par sa toute-puissance et son omniscience rend impossible la liberté humaine.

En s’inspirant de Joachin de Flore, mais en le dépassant et  sans reprendre l’aspect modaliste et sa division chronologique,  Moltmann développe cette doctrine théologique positive de la liberté qui se fonde sur le principe trinitaire.

Il s’agit de comprendre l’histoire du royaume de façon trinitaire : les règnes du Père, du Fils, de l’Esprit sont des strates et transitions constamment présentes dans l’histoire.

 

Le règne du Père :

C’est précisément quand nous comprenons la création du monde de façon trinitaire, comme une action qui se limite elle-même, du Père par le Fils dans la force de l’Esprit, comme une première étape sur le chemin de la liberté.

Là où règne non pas le grand Seigneur du monde mais le Père de Jésus-Christ, un espace est donné à la liberté des créatures.

Là où ce n’est pas le grand Seigneur  du monde mais le Père de Jésus-Christ  qui conserve dans sa patience le monde, de l’espace et du temps sont laissés à la liberté au sein même de l’esclavage dont les humains sont eux-mêmes responsables.

« Le  Père règne par la création de l’être et l’ouverture du temps »

 

Le règne du Fils

« Consiste  dans la souveraineté libératrice du crucifié et dans la communauté avec le 1er né d’une multitude de frères et sœurs… Il introduit les hommes dans la glorieuse liberté des enfants de Dieu en les configurant à lui-même dans sa propre communauté. Quand il se détourne du créateur, la délivrance de cette mort vers l’ouverture originelle ne peut avoir lieu par la domination et par la contrainte mais par une souffrance suppléante et par l’appel à cette liberté qui est maintenue ouverte par la souffrance suppléante.

Le Règne du Fils est en forme de serviteur. Il règne par la libération pour la liberté.

 

Le règne de l’Esprit.

L’expérience de l’Esprit, c’est être saisi par la liberté pour laquelle le Fils nous a libérés. Il donne accès à l’immédiateté avec Dieu. Il est Dieu en nous. Par la foi  et l’écoute de sa conscience, l’homme devient ami de Dieu. Par l’Esprit, l’homme fait l’expérience des énergies de la nouvelle création. Il est à la naissance de la communauté nouvelle  sans privilège, sans subordination : communauté d’hommes et de femmes libres.

 

En cohérence aussi avec son principe eschatologique, Moltmann, précise que ce règne de l’Esprit est orienté vers le règne de la gloire mais qu’il n’en est pas encore l’accomplissement. L’expérience de l’Esprit qui rend l’homme temple de Dieu (1co 6/13) est anticipation de la gloire où le monde sera temple du Dieu trinitaire (Ap 21/3).  Ce règne de gloire sera accomplissement de la création du Père, application universelle de la rédemption du Fils, achèvement de l’inhabitation de l’Esprit.

 

 Cette doctrine trinitaire de la liberté est histoire progressive et croissante de la liberté. Le Père est liberté des créatures qui maintient l’espace vital nécessaire ; le Fils est libération des hommes de leur enfermement grâce à l’amour souffrant qui restaure la liberté. L’Esprit est force et énergie de la nouvelle création.

 

Confesser Dieu ainsi n’est donc pas négation de la liberté humaine mais au contraire elle l’oriente pour une espérance infinie. A condition de ne pas se tromper de liberté.

Il y a la liberté conçue comme domination, c’est celle qui gagne et domine et celle du maitre seul soumettant et exploitant ceux qui perdent, les   non-libres que sont les femmes, les enfants, les esclaves sur lesquels règne le maître.

La liberté comme domination est une liberté qui est aux dépens des autres. Liberté pour l’un qui est oppression pour l’autre, richesse qui rend pauvres les autres.

La liberté comme domination ne connait  que soi. « Cette manière d’entendre la liberté comme domination s’enracine dans une société typiquement masculine comme le signale en allemand le mot Herrschaft » . C’est celle du libéralisme bourgeois qui a remplacé l’absolutisme royal et la féodalité, liberté où tout homme est un concurrent dans la lutte pour le pouvoir et la propriété, où tout homme n’est pour l’autre homme que la limite de sa liberté.

 

Elle s’oppose à la liberté comme communauté « C’est seulement dans l’amour que la liberté humaine acquiert sa vérité : je suis libre et je me sens libre quand je suis respecté et reconnu par les autres et quand de mon côté je  respecte et reconnait les autres. Je deviens réellement libre quand j’ouvre ma vie aux autres et que je la partage avec eux et quand d’autres m’ouvrent leur vie et la partagent avec moi » Cette liberté comme communauté doit se compléter par la liberté des sujets à un projet : « Celui qui transcende le présent vers l’avenir, en pensées paroles, et œuvres, celui-là est libre.

 

Du point de vue théologique, ceci est la dimension particulière de l’expérience de l’Esprit : dans l’Esprit nous transcendons le présent vers l’avenir de Dieu car l’Esprit est la caution de la gloire. La liberté dans la lumière de l’espérance est la passion créatrice pour le possible... l’avenir est le règne des possibilités non encore définies, alors que le passé représente le règne limité de la réalité »

 

Cette dimension future de la liberté longtemps ignorée par la théologie « parce qu’on n’a pas compris la liberté de la foi chrétienne comme une participation à l’Esprit créateur de Dieu »

 

 

Trinité et Royaume de Dieu , Collection Cogitatio fidei n° 123 , éditions du Cerf p 263

TRD p 264

TRD 269

TRD p 270

TRD p271

TRD p 272

 

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