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21 novembre 2011 1 21 /11 /novembre /2011 23:56

Jésus-Christ donne accès à Dieu au fil d’une histoire qui rejoint nos vies

Joseph Moingt écrit : « Ce Dieu qui est mort  n’est donc pas authentiquement, malgré son origine chrétienne,  celui qui s’est révélé en Jésus, c’est le Dieu de la religion et de la raison, dont la tradition chrétienne avait revêtu le Dieu de Jésus ».

Quelle est l’image de Dieu qui ne peut que provoquer rejet et indifférence ? Quelle image à partir des Evangiles revisités peut à nouveau intéresser l’homme d’aujourd’hui, lui ouvrir des chemins de salut ?

Que disons-nous quand nous disons Dieu, de son accès par Jésus-Christ qui soit bonne nouvelle de salut ?

Cet Evangile revisité, bonne nouvelle, Joseph Moingt nous en livre une esquisse quand il s’interroge sur ce qui a pu étonner les contemporains de Jésus. Ce texte montre l’originalité de l’accès à Dieu inauguré par le Christ, un accès qui est bonne nouvelle de salut pour l’homme d’aujourd’hui.

En suivant le texte de Joseph Moingt, voici ce qu’il me semble possible de repérer. Joseph Moingt fait une relecture du récit évangélique. La bonne nouvelle de l’Evangile se présente sous forme de récit. L’accès à Dieu par Jésus-Christ n’est pas un discours, mais une vie racontée. Vie racontée selon des intentions théologiques, des schémas de récit, mais qui reste en style narratif. Jésus, ça se raconte. Vie racontée et interprétée de manière différente selon les époques. La relecture qu’en fait Joseph Moingt est sur fond d’une situation de modernité, d’un monde d’indifférence à la question de Dieu. L’accès à Dieu par ce récit évangélique peut dire quelque chose de pertinent pour l’homme d’aujourd’hui, d’abord parce qu’il est récit. Pourquoi ? Le récit d’une vie (même théologisé et normé comme le sont les Evangiles) rejoint nos vies. Il est question de naissance, d’actions, de paroles, de relation, de conflit, d’amitié, de souffrance, de repas, de mort, d’amour, de vie, d’espoir … et de ce fait le récit rejoint les questions fondamentales de la vie humaine. L’accès à Dieu par Jésus se dit au cœur d’une vie humaine et donc peut rejoindre les nôtres.

Les rejoindre, mais pour quoi ? Pour les libérer de ce qui les empêche d’être humanisées et humanisantes. Joseph Moingt remarque que les miracles de Jésus décrivent des situations symboliques sur le côté nocturne de notre vie : ce qui est lié au mal, à la souffrance, à la mort et met Jésus en contact avec des gens confrontés au tragique de l’existence : mort, maladie, pauvreté, injustice du sort, et de ce fait « exclus ». C’est la parole de Jésus « par l’intensité de la relation qu’il nouait avec tous ces exclus qui leur donnait la force de briser les chaînes de leur destin qui entravaient leur liberté. » Ce récit rejoint nos vies pour les transformer, pour les libérer de ce qui les entrave. Le fait de donner des textes de guérisons pendant des retraites spirituelles montre bien la force de transformation dont ces textes aujourd’hui sont porteurs : guérison spirituelle de surdité, de mutisme, de paralysie… Nous sommes ici au cœur d’une expérience de salut. Ce symbolisme nous est accessible car nous pouvons pressentir que notre propre destin y est représenté : « La parole de Jésus est porteuse pour nous aussi d’un message et d’une force de libération ».

Egalement par  la clarté libératrice de son enseignement : « Il rendait possible à tous les humains un avenir différent, ouvert à une communication libre et fraternelle entre tous, parce qu’il défendait la cause des opprimés, se faisait le partenaire de ceux qui n’avaient pas d’interlocuteur et rendait la parole à ceux qui en étaient dépossédés ».

Son enseignement peut être synthétisé par le mot de Royaume. Sa manière d’en parler donne à voir ce que Dieu veut. Quand un scribe lui déclare qu’aimer Dieu et le prochain vaut mieux que tous les sacrifices et les holocaustes, Jésus lui répond qu’il n’est pas loin du Royaume Mc12, 34. Un royaume qui n’est refusé à personne.

L’Evangile de Marc commence par cette déclaration de proximité : « le royaume de Dieu est tout proche » Mc 1,15. Proximité du Royaume non pas temporelle mais dans  « l’horizon de l’existence de chaque jour ». Non pas refoulée dans le futur mais déjà là en toute occasion. Royaume déjà à l’œuvre dans l’histoire et dans les cœurs comme une semence.

Les images employées dans les paraboles prouvent cette proximité dont personne n’est exclu. Des images de la vie quotidienne comme la lampe, la mesure de farine, la pièce d’argent, la brebis, la semence. Un royaume fait d’événements courants et non pas dans un hors-monde ou dans un espace pensé comme sacré, séparé du profane. Par ce royaume donné comme proche, c’est la compréhension même de l’accès à Dieu qui est présentée. Un Dieu qui se trouve et se laisse trouver dans la vie humaine la plus simple quand elle est porteuse de vie, de croissance.

Qui a entendu ces paroles a entendu Dieu, qui a vu celui qui les disait et qui les vivait a vu Dieu car son « Message est inséparable de sa personne »

Actes et paroles de libération qui interrogent sur son identité. Qui est-il ? Lui-même posera la question : « Pour vous qui suis-je ? » La question de Dieu est donc à poser, en régime chrétien, au cœur de la vie humaine de Jésus. La vie humaine de Jésus est accès auprès de Dieu. Jésus dit Dieu par sa vie humaine. « Qui m’a vu a vu le Père ». C’est sa vie qui nous dit Dieu et nous donne accès à lui, dans une connaissance qui ne peut qu’être expérience d’un « suivre ». Il nous dit Dieu par l’originalité de sa propre expérience de relation avec celui qu’il appelle Père, par la manière singulière, marginale, de se situer face à Dieu : un lien de réciprocité qui a questionné et peut continuer à questionner. « Qui donc est Dieu pour lui et qui est-il en vérité pour tous les hommes si Dieu trouve en lui sa vraie manifestation ? » Il nous dit Dieu et nous ouvre un chemin d’accès à lui. Il parle et fait expérimenter par son attitude même un Dieu miséricordieux. Il donne à voir un Dieu non de vengeance mais de  pardon, qui aime qu’on lui fasse confiance, qui aime pardonner, donner, accueillir les petits. Voici les constantes de l’image de Dieu qu’il donne à voir.

Ce qui est donné à voir est une vraie révolution religieuse : c’est un Dieu qui sort des catégories du religieux. (le rituel, le sacrifice, la délimitation d’un espace sacré, la démarcation entre le pur et l’impur). Joseph Moingt développe cette sortie du religieux qui change justement les codes d’accès à Dieu. Cela me semble d’autant plus pertinent que cette sortie du religieux est aussi, par là même, contestation de tout religieux sécularisé et peut donc éclairer l’homme incroyant sur son comportement.

J. MOINGT, Le Dieu qui vient à l’homme, tome 1, Cerf, 2002, p 276

Joseph Moingt, l’homme qui venait de Dieu, Cerf, 2002, le prologue p21-69

Idem p. 47

P 48

P 47

P 60

P 58

P 57

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commentaires

A
"un Dieu qui sort des catégories du religieux" : merci de ta manière claire de nous introduire à voir cette révolution de Jésus (que Paul dans les Actes et les lettres développe aussi) qui nous<br /> ouvre le chemin vers le Père d'une manière unique : un Dieu source de vie qui est heureux et avide de se faire connaître, rencontrer, de rejoindre tous ceux que nous sommes prompts à juger,<br /> exclure, parfois à stigmatiser de nos faiblesses et péchés collectifs. "La richesse de sa grâce dont il déborde jusqu'à nous" (Ephésiens 1, 8) le dit bien ou le psaume 65 (64) : "tu visites la<br /> terre et tu l'abreuves ; tu la combles de richesses...sur ton passage ruisselle l'abondance". Dans nos vies aussi, des rencontres même fugaces avec des "familiers" de Jésus nous ont donné le goût<br /> de découvrir ce visage d'un Dieu surprenant, qui réconcilie sacré et profane, une annonce d'un salut qui est une personne qui dit "Suis-moi !" dans notre aujourd'hui, dans les visages, les<br /> détresses, les combats que nous côtoyons et dans lesquels nous sommes impliqués par nos solidarités humaines dont Dieu se révèle le "souffle".
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