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5 août 2018 7 05 /08 /août /2018 16:13
Parler autrement...du salut

« Pour nous les hommes et pour notre salut »

Disons-nous dans le crédo.

Nous sommes donc des sauvé-es !

Mais que mettons-nous derrière ce mot ?

Sauvé-es de quoi ? Sauvé-es comment ? Sauvé-es par qui ?

Sauvé-es mais comment le voit-on ?

 

Des pistes de réflexion en s’inspirant librement de Adolphe Gesché : Dieu pour penser la destinée, chapitre 1 : Topiques de la question du salut page 27 à 69

 

 

La réponse qui vient immédiatement, c’est de penser le salut comme l’équivalent de la vie éternelle : pour faire bref, être on non au Paradis. Cette manière de penser le salut a été centrale dans la réflexion chrétienne. La seule chose importante était le sort individuel de chacun après la mort. C’est le discours de Pierre à la Pentecôte : faites-vous baptiser et vous serez sauvés. C’est ce qui explique la pratique de chrétiens des 1ers siècles qui attendait l’imminence de la mort pour se faire baptiser ou encore l’instauration du baptême des enfants pour leur éviter l’enfer s’ils mourraient. C’est le nœud du différent de Luther et de l’Eglise catholique romaine : sauvé-e par la foi ou par les œuvres ?

Cette manière de voir le salut demande d’être examinée pour qu’elle soit crédible.

 

D’abord la comprendre

*Quand on naissait avec une espérance de vie moyenne de 30 ans,

*Quand le monde que vous quittiez à la mort, était le même qu’à votre naissance, sans changement

*Quand il n’y avait aucune espérance de changer les choses  

Et bien la question de votre destin éternel était la seule question vitale.

 

Ensuite voir sur quel schéma théologique il s’appuyait : un monde paradisiaque à l’origine qui avait été détruit par le péché dit originel introduisant la mort et la perdition. Sauvé-e par la mort rédemptrice du Christ et dont on reçoit les fruits par le baptême.

Si on prend une image, c’est comme si on est perdu en mer, la seule chose désirée est d’être sauvé-e. La seule chose espérée est qu’un sauveteur arrive. Cela suppose donc qu’il soit arrivé une catastrophe comme par exemple que son bateau ait coulé.

 

C’est sur ce schéma qu’est conçue une certaine conception du salut en théologie chrétienne.

En poursuivant mon image cela donne cela :

*Le bateau est sur l’eau tranquille= c’est la création sortie des mains de Dieu, le paradis

*Le bateau coule, le marin est perdu= c’est le péché originel

*Il est repêché= c’est la rédemption

 

Ce schéma n’est plus pensable depuis que l’on sait que notre existence sur terre est le fruit d’une longue évolution. Il n’est plus possible de penser une terre qui aurait un jour été un paradis, un homme et une femme qui auraient fait une faute telle que toute l’humanité à cause d’eux aurait été perdu et que leur salut est  possible par la mort de Jésus sur la croix !

 

Impensable devant l’évidence de nos connaissances scientifiques mais impensable aussi si l’on réfléchit à l’image de Dieu que cela donne en particulier celle d’un Dieu qui ferait rejaillir la faute de deux sur tous et qui ne pourrait  pardonner et sauver que par du sang répandu sur une croix.

 

C’est cette théologie qui a gagné en Occident en particulier avec St Augustin. Mais d’autres théologies ont produit d’autres conceptions :

St Irénée, qui voit la création dans une histoire où les péchés des humaines sont des fautes de jeunesse ; ou encore les théologies chrétiennes orientales qui conçoit le salut comme un désir de Dieu de s’unir à nous.

 

Il y a donc à penser le salut d’une manière plus large.

 

Le salut c’est ne pas passer à côté de sa vie, ne pas la manquer.

Parler ainsi du salut ou non salut, c’est le parler en termes de bonheur ou de malheur, de réussite ou échec.

L’étymologie du mot salut nous le dit déjà puisque cela vient du mot

Salvus qui se traduit par sain, solide et Salvare qui veut dire rendre fort garder, conserver.

On est donc dans un registre d’épanouissement, aller jusqu’au bout de soi-même, s’accomplir, trouver sa vie, le sens de sa vie.

En parlant de salut de cette manière là, on peut être en phase avec une aspiration humaine fondamentale et donc parler à nos contemporains. Cela fait appel à notre conscience d’un inachèvement de notre être qui aspire à un plus, à un mieux, qui a soif d’un accomplissement.

 

Mais c’est d’abord notre être même qui est un salut ! Dieu en créant le monde nous a sauvé du néant c'est-à-dire de ne pas exister !

L’acte créateur est un acte de salut : nous sauver de l’inexistence.

Acte de liberté de Dieu qui veut aimer en lui-même (La Trinité) mais aussi à l’extérieur de lui vers nous.

Cette mise au monde n’est pas pour retomber dans le néant mais pour une relation d’amour éternel (et nous retrouvons ici le salut évoqué au début). Notre vie n’est pas pour rien. Elle est ordonnée finalisé par une vie d’amitié avec Dieu pour l’éternité. Nous sommes habité-es par un infini. Cette dignité est notre salut. C’est ce que les théologies chrétiennes orientales nous disent en parlant de divinisation.

 

 

Cette mise au monde se fait dans une histoire où le désir de Dieu est que nous devenions de plus en plus ce que nous sommes déjà : image et ressemblance de Dieu. Nous retrouvons là ce qui a été dit de l’épanouissement.

Mais sur ce chemin, il y a des obstacles : des obstacles sur le chemin de l’accomplissement.

Sauver c’est donc aussi être délivré de ce qui fait obstacle à l’accomplissement.

On n’est pas dans un schéma d’être condamné-e par une malédiction.

Il ne s’agit pas d’être délivré-e de soi comme si on trainait en soi une nature en soi mauvaise.

On n’a pas à être délivré-e de soi mais de ce qui m’empêche d’être soi. Cela indique une haute idée de l’humain, car cela veut dire que sa vie a du prix et qu’elle ne doit pas se perdre, donc délivrée de ce qui fait obstacle à sa réussite.

 

C’est là que nous retrouvons la question la mort

Au cœur de la foi chrétienne il y a d’être sauvé-e de la mort avec l’assurance qu’elle a déjà été vaincu par la résurrection du Christ.

La mort n’est pas l’obstacle absolu, nous ne sommes pas des êtres pour la mort, la mort n’est pas sa finalité.

 

Et toutes les formes du mal ? :

Souffrance, mal subi, mal voulu ; contraintes de tout ordre, impuissance, conditionnements, limites de la liberté ; hérédité, déterminisme, contraintes culturelles ; épreuves de malchances sociales, maladie injustices.

Ce sont des obstacles à la réussite de notre être. On peut s’enfermer là-dedans : il n’y a rien à faire.

Face à cela, le Christ est sauveur comme antidote

Et c’est un des sens de l’incarnation : instaurer dans notre histoire, une vie humaine qui guérit et libère, et qui peut nous rendre capable de décisions créatrices, de transgression de ce qui parait de la fatalité impossible à dépasser.

En particulier, il nous sauve de la peur en nous ouvrant la voie de la confiance en nous. Il nous sauve en nous révélant l’image de Dieu telle qu’elle est : Celui qui dit oui à notre existence, nous donne confiance pour pouvoir à notre tour dire oui à nous même. Il nous sauve par l’amour qui va jusqu’au bout du don au point de faire éclater la mort par sa pâque de la mort à la vie.

 

Ici arrive une objection majeure

A voir le spectacle du monde on peut légitimement penser que le salut est loin de notre terre : nous ne sommes pas sauvés.

Mais dès maintenant, dans une perspective chrétienne nous pouvons dire que nous sommes sauvés de la tyrannie du mal. Délivré de sa tyrannie, de la peur, du sentiment d’impuissance.

Dès maintenant nous pouvons être délivré de ce qui nous enlève toute force. Un salut est possible qui est de construire le royaume inauguré par Jésus.

Et ici c’est un salut confié : justice, libération, lutte contre les exclusions, pardon, compassion.

Cette révélation et cette visibilité sont à nous confié-es.

 

« Je suis venu pour qu’on ait la vie et la vie en abondance »

 Jn10/10

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commentaires

D
Une magnifique respiration d'air frais ! En regard de tous les étouffements dont nous ont oppressé des lectures théologiques du concept de "salut" qui avaient pris le parti de laisser de côté l'essentiel : il ne saurait y avoir d'acception véritablement spirituelle du monothéisme - qui implique la confrontation entre un D.ieu aimant et la souffrance du monde dont ce même D.ieu semble revendiquer inexplicablement la création - sans que l'espérance ait été la lumière essentielle de son intuition et de son déchiffrement.<br /> « Les théologies chrétiennes orientales qui conçoivent le salut comme un désir de Dieu de s’unir à nous », et qui nous représentent ce salut « en (nous) parlant de divinisation » mettent ainsi la grâce d'espérance au dessus de tout. Au reste, si le mal ne laisse ébrécher son mystère qu'en se projetant à notre entendement comme la réverbération de la mort, c'est tout le "croire" qui est inclus dans l'espérance : celle « d’être sauvé-e de la mort (qui) a déjà été vaincu par la résurrection ». <br /> Et par là, ce "croire" se circonscrit en fin de compte à la figuration et à la restitution johannique de la Rencontre au Tombeau : à la découverte, à la compréhension, à la prise de conscience de Marie de Magdala de ce que c'est le Messie vainqueur de la mort qui est apparu derrière elle. Et, par l'injonction qui lui est faite - "Cesse de me toucher", dont la référence à la Loi s'impose naturellement à son esprit -, qu’en ce Messie, et pour la dernière fois, c’est l’incarnation, pleine et entière qui est encore présente dans notre monde parce qu’elle est devenue invincible. Et qu’il lui est offert de contempler et d’aimer.<br /> Le temps messianique peut ainsi se lire comme un parcours qui met en symétrie l’incarnation et la résurrection, qui les dispose l’une et l’autre dans une insertion réciproque par rapport à l’espérance. Parce qu’aucune de ces assertions d’un non-vraisemblable ne va sans l’autre, parce que chacune se réfléchit dans l’autre et se valide de la seule allégation de l’autre. Parce que l’incarnation dans un Fils de l’homme qui, en tant que tel, expose sa résurrection fonde l’espérance de tous les hommes à être sauvé-es de la mort pour la seule raison qu’ils sont hommes créés et aimés de D.ieu. <br /> Et donne son sens à une « histoire où le désir de Dieu est que nous devenions de plus en plus ce que nous sommes déjà : image et ressemblance de Dieu ».
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