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30 janvier 2016 6 30 /01 /janvier /2016 22:13
Trinité et rapports sociaux (1)

« Ce qui correspond au Dieu trinitaire, ce n’est pas la monarchie d’un souverain mais la communauté des hommes sans privilèges ni servitudes ».[1]

Cette citation du théologien Moltmann montre qu’il y un lien fort entre théologie et rapports humains.

La doctrine trinitaire de Moltmann, doctrine sociale de la Trinité, est pertinente pour penser l’anthropologie de l’humain, femme et homme: de même que la femme et l’homme sont un dans leur commune nature humaine au sein d’une différence, de même la Trinité est une dans leur commune nature divine et la différence des personnes.

Pour cela des conditions sont à remplir : penser d’une part la Trinité des personnes divines et d’autre part la relation homme-femme dans une parfaite égalité et ne pas penser Dieu comme un souverain masculin.

Car, si on  pense ainsi, nous avons une monarchie divine au ciel qui fonde la souveraineté du pouvoir d’un seul sur terre.  Nous avons l'idée aliénante  d’un tout puissant souverain du monde qui exige une servitude, une dépendance et qui fonde une souveraineté terrestre, religieuse, morale, patriarcale.

L’enjeu est aussi une question de crédibilité de la foi. Les fausses images d’un Dieu qui aliène l’homme dans sa liberté, ne peuvent qu’être rejetées par nos contemporains.

 

[1] J. MOLTMANN, Trinité et Royaume de Dieu, cerf, 1984, Collection Cogitatio fidei 123, page 249

 

 

 

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25 janvier 2016 1 25 /01 /janvier /2016 23:10
Qu’est-ce que la méditation chrétienne ?

Je vais commencer par une réflexion que m’a partagé un jour une Sœur du Cénacle qui est philippine. Elle me disait, dans mon pays, les gens, s’ils veulent pour leurs enfants une bonne école, ils se tournent les chrétiens…s’ils veulent un bon hôpital, ils vont aussi chez les chrétiens. Mais s’ils ont le désir de méditer…ils vont chez les bouddhistes.

Cette réflexion m’a beaucoup fait réfléchir. Car il n’y a pas qu’aux Philippines. Regardez les rayons des librairies au rayon méditation : vous trouverez du zen, du bouddhisme, rien ou si peu ayant une coloration chrétienne. Comment expliquer cela ?

D’autant plus que ça existe la méditation chrétienne et que le christianisme a initié de nombreuses manières de méditer. Pour ne parler que de lui, au Centre spirituel du Cénacle de versailles,centre ne fait que cela. On passe nos journées à aider des gens à entrer dans l’expérience de la méditation !

Alors pourquoi cette méconnaissance?

D’une manière globale le christianisme a développé les traits suivants :

*religion de la morale et du faire. La dimension éthique est importante mais c’est une conséquence pas une source. Ce n’est pas l’âme du christianisme.

*religion du rite. Le rite est précieux mais là aussi c’est une conséquence pas une source et pas l’âme du christianisme.

*religion politique. Au sens que le christianisme après Constantin est devenue une religion officielle, une religion liée au politique et qui imposait un contrôle social à tous. Avec pour conséquence entre autre chose, que l’adhésion était collective, en se coulant dans le moule, alors que l’âme du christianisme est que l’adhésion nait d’une conviction personnelle.

 

Alors quelle est l’âme du christianisme ?

C’est ce qu’on voit dans les Evangiles : une rencontre personnelle avec Jésus qui fait devenir disciple et marcher avec lui. On voit que cette rencontre change les gens : cela change leur rapport à leur corps, à leur vie, ils apprennent à écouter, à regarder leur vie, les autres autrement. Cette transformation se fait en regardant et écoutant Jésus.

Tous leur sens sont réveillés. L’âme du christianisme, c’est une relation avec Jésus.

 

Mais le vivons-nous vraiment ? Comme la rose : un peu, beaucoup, passionnément, pas du tout ? …Pourtant c’est là l’essentiel, et la méditation chrétienne est là pour passer du pas du tout au peu et ensuite au beaucoup et au passionnément. Comment faire ? 

 

Méditer c’est prendre du temps pour soi. Vous le valez bien dit la pub ! S’assoir, arrêter d’agir, s’extraire du regard des autres, respirer profondément, se détendre, goûter une solitude bénéfique

Méditer, c’est rencontrer Jésus l’ami de nos vies, celui à qui on peut tout confier, qui est l’oreille attentive, en fait notre lieu de parole ; et se rendre compte que le fait de lui parler peut déjà changer notre perception.

Méditer, c’est ouvrir un des Evangiles. Vous en choisissez un – je vous conseille celui de Marc- avec une seule chose à faire :

Regarder Jésus, ce qu’il fait, ne fait pas, ses actes. Ne vous creusez pas la tête, n’essayez pas d’avoir des idées, de réfléchir. Non soyez seulement là à côté de lui, comme un disciple qui regarde, heureux d’être là, « Heureux les yeux qui voient ce que vous voyez ».

Ecoutez ce que dit Jésus, ses paroles. Pareil ne vous creusez pas la tête, n’essayez pas d’avoir des idées, de réfléchir. Non soyez seulement là à côté de lui, comme un disciple qui écoute, heureux d’être là.

 

Surtout ne vous cassez pas la tête à réfléchir ! Aller à la méditation non pas comme à un rendez-vous mais parce que c’est un rendez-vous avec un ami qui va vous écouter et que vous allez regarder et écouter. Comme au coin d’un feu avec un ami qu’on aime et qui nous aime ; un ami avec qui on a plaisir à lui parler et le regarder et l’écouter.

C’est tout ! Mais c’est cela qui peut faire que peu à peu, on a une relation au Christ qui va grandir, où il va devenir l’amour de nos vies. C’est ce regard contemplatif et cette écoute attentive qui va nous transformer de l’intérieur.

La méditation chrétienne c’est comme celui qui est sur la plage et se laisse brunir par le soleil. Il suffit de rester sans rien faire, sinon d’être là, de s’exposer au soleil de Dieu. A la mesure du temps passé à le regarder et à l’écouter, la vie, la beauté, la bonté qui est en lui passe en nous, à l’image de la transfusion sanguine.

 

La méditation chrétienne, c’est habiter sa vie, le monde car ils sont précieux pour Dieu et ont de la valeur à nos yeux.

C’est s’ouvrir à une présence bienveillante et aimante

C’est regarder et écouter sans chercher autre chose que d’être là près du Christ, sans rien faire que d’être là, mais être là, c’est ce qu’on peut faire.

A mesure qu’on donne du temps à regarder et écouter, on arrive à goûter intérieurement, cela a bon goût. Sentir la bonté de Jésus. On peut même arriver mentalement à faire un geste auprès de Jésus, à le toucher comme cette femme qui a touché son vêtement. Méditer donc avec les cinq sens.

 

La seule décision à prendre est de regarder son agenda, et mettre un créneau « méditation » comme on met d’autre rendez-vous. Peut-être si vous êtes débutant :

30 mn un jour par semaine. Ca peut être aussi pour d’autres 15mn par jour ou une autre formule. C’est à vous de voir ce qui est le plus réaliste en fonction de votre vie.

Alors oui, la méditation peut devenir un bonheur d’être !

 

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19 mai 2015 2 19 /05 /mai /2015 21:04
La Trinité, une manière de vivre: Jean 15/9-17

Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour.

Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez dans mon amour, comme moi, j’ai gardé les commandements de mon Père, et je demeure dans son amour.

Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous, et que votre joie soit parfaite.

Mon commandement, le voici : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés.

Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime.

Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande.

Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; je vous appelle mes amis, car tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître.

Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis, afin que vous alliez, que vous portiez du fruit, et que votre fruit demeure. Alors, tout ce que vous demanderez au Père en mon nom, il vous le donnera.

Voici ce que je vous commande : c’est de vous aimer les uns les autres.

Cet évangile de Jean nous fait témoin d’une relation. Jésus se situe comme Fils devant le Père. Mais cette relation n’est pas fermée sur elle-même. Elle s’ouvre à nous et nous y fait entrer. Ce faisant, cet évangile donne son vrai nom à Dieu, l’essence de Dieu, son être. Non seulement Dieu aime mais il est Amour.

Bienheureux sommes-nous de pouvoir nous situer devant l’Amour qui est Dieu, tel qu’il se révèle à nous dans l’Evangile parce que nous y découvrons que l’amour qui est Dieu n’est pas solitaire. L’Amour qui est Dieu est en relation à l’intérieur de lui-même, car pour aimer il faut qu’il y ait de l’autre, de la différence et en même temps de l’unité.

Il y a donc bien de l’unité : un seul Dieu. Dans cette unité, il y a Dieu Source de l’amour et c’est le Père. Il y a Dieu Parole de l’amour et c’est le Fils. Il y a Dieu Souffle vivifiant de l’amour et c’est l’Esprit. Unité qui est union, communication, communication d’amour en elle-même, en Dieu même.

Et puisque c’est un amour véritable, il n’y a aucune trace dans la Trinité, aucune trace d’inégalité, aucune trace en Elle de supérieur et d’inférieur. En Elle c’est un infini et divin respect de l’altérité, sans confusion ni séparation. C’est une relation faite de don et d’accueil du don dans la réciprocité.

St Ignace de Loyola a magnifiquement compris cela quand il définit l’amour ainsi : « L’amour consiste en une communication réciproque, c'est-à-dire que celui qui aime donne et communique ce qu’il a à celui qu’il aime et de même à l’inverse celui qui est aimé à celui qui l’aime » ( Exercices spirituels n° 231)

Dieu dans sa Tri-Unité est aussi communication d’amour en dehors d’elle-même, Elle est pour nous, vers nous, tournée vers nous. C’est un amour diffusif de soi qui nous façonne à son image et à sa ressemblance.

Nous en sommes bénéficière mais aussi responsable. En effet la Trinité d’amour qui est Dieu, nous invite à vivre entre nous, ce qu’Elle vit en elle-même. Donc nous invite à vivre ce que nous sommes, à nouer entre nous le même type de relation qu’il y a en Dieu, faite d’égalité, de respect, de réciprocité. De ce fait la Trinité dit notre vocation, et cette vocation c’est une existence fraternelle, une existence sororelle. Il y a donc un lien fort entre la manière de vivre entre nous et la vie trinitaire. L’amitié entre nous, la justice entre nous, l’égalité entre nous, le respect entre nous, dit quelque chose de l’amitié trinitaire. L’amitié trinitaire est source et modèle des relations justes et fraternelles entre nous.

De ce fait, nous pouvons nous rendre compte que les affirmations de la foi ne nous laissent pas tranquilles. Elles ne sont pas là comme des formules qu’il suffirait de répéter. Non, les affirmations de notre foi interrogent nos manières de vivre en société. Les interrogent et les contestent.

Affirmer, confesser Dieu-Trinité est un engagement.

C’est s’engager à une vie qui promeut l’égalité, l’amitié, le respect, la réciprocité pour chacun, chacune à l’image de l’amour qui est Dieu. C’est une grâce à désirer, une grâce à demander pour que notre foi s’incarne davantage, s’incarne vraiment dans nos vies et dans nos sociétés. C’est cela « demeurez dans son amour ».

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3 avril 2015 5 03 /04 /avril /2015 16:56
Du fermé à l'ouvert: le tombeau vide Jn 20/1-9

Jn 20/1-9

Le premier jour de la semaine, Marie Madeleine se rend au tombeau de grand matin ; c’était encore les ténèbres. Elle s’aperçoit que la pierre a été enlevée du tombeau. Elle court donc trouver Simon-Pierre et l’autre disciple, celui que Jésus aimait, et elle leur dit : « On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a déposé. » Pierre partit donc avec l’autre disciple pour se rendre au tombeau. Ils couraient tous les deux ensembles, mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau. En se penchant, il s’aperçoit que les linges sont posés à plat ; cependant il n’entre pas. Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour. Il entre dans le tombeau ; il aperçoit les linges, posés à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part à sa place. C’est alors qu’entra l’autre disciple, lui qui était arrivé le premier au tombeau. Il vit, et il crut. Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris que, selon l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts.

 

Le tombeau était scellé. La mort semblait triompher. C’était à la fois la personne de Jésus mais aussi son message, le Royaume dont il témoignait qui étaient enterrés. Un Royaume qu’il avait commencé à instaurer par ses paroles et ses actes. Royaume de respect de toutes et tous sans discrimination. Royaume de frères et sœurs dans l’égalité. Royaume de justice, de pardon, de partage. Royaume de joie. C’est tout cela qui se trouvait enfermé dans la nuit du tombeau. Et l’inouï se produit : la tombe est ouverte et vide. Où est-il ? La vie a triomphé de la mort. Dieu a ouvert ce qui était fermé. Et cette ouverture est pour nous le gage de la victoire sur tout ce qui nous enferme, de tout ce qui est mortifère : Dieu est de notre côté dans l’Ouvert. Et c’est depuis toujours que Dieu a pris le parti de l’Ouvert : Créer, recréer, ressusciter, c’est ouvrir. Prendrons-nous le même parti ? Pour cela, une vraie conversion est nécessaire : la résurrection du Christ n’est pas quelque chose à croire comme on récite une formule, c’est quelque chose à vivre. Vivre ce que l’on croit, c’est répondre à un appel à vivre autrement. La foi est un engagement, une prise de position, un combat pour faire gagner la vie, pour faire gagner le royaume de respect d’égalité, de partage de justice inauguré par Jésus. C’est vivre dans l’ouvert. Un des drames de l’histoire de l’Eglise, c’est de n’avoir pas su assez tiré les conséquences politiques et sociales de la résurrection. La résurrection donne raison à Jésus, donne raison à ce qu’il a fait contre ceux qui l’ont crucifié au nom de fausses conceptions de Dieu, et parce que Jésus remettait en cause l’utilisation religieuse du pouvoir et voulait un royaume de justice. Au lieu d’en faire un formidable levier de résistance à l’injustice, elle a souvent servi à n’être qu’un article de foi qui renvoyait la justice à la vie après la mort, ne contestait aucun pouvoir, confortait une résignation. L’impossibilité d’une lecture sociale et politique de la résurrection s’explique par la résistance au changement mais aussi au fait qu’on vivait dans un monde qui semblait immobile : entre naissance et mort d’une personne, rien n’avait changé. Aujourd’hui, dans nos sociétés, entre sa naissance et sa mort une personne a pu voir et vivre de profonds bouleversements. C’est pourquoi, la lecture sociale de la résurrection a plus de chance aujourd’hui d’être reçue. La résurrection est bien l’espérance que nos vies sont faites pour l’éternité, que rien n’est jamais perdu pour Dieu, jamais fini pour Dieu mais elle est aussi la certitude que Dieu ne se résigne pas à l’injustice, qu’il la combat à côté de ceux qui la subissent et la combattent. Comment faire pour que l’orthodoxie d’un énoncé de foi ne reste pas inopérante dans nos vies et nos sociétés ?

« Il vit et il cru ». Qui y-a-t-il à voir et croire ? Hier et aujourd’hui ?

Voir le Christ humilié et crucifié en tout personne humaine qui souffre, dans toutes les déshumanisations de notre monde Voir la résurrection à l’œuvre en tout lieu, en toute action, en toute personne, en tout ce qui humanise notre monde. Croire en la résurrection, c’est croire sortir de ce qui est fermé pour ouvrir les chemins du possible.

 

J'ai écrit cet article pour le numéro 3628 de la lettre de Témoignage chrétien du 2 avril 2015

 

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3 janvier 2015 6 03 /01 /janvier /2015 12:07

 

Le texte de mon intervention est paru sur ce blog il y a quelque temps. Voici maintenant la possibilité de l’écouter et la voir !

En cliquant sur :

https://www.youtube.com/watch?v=xnuBFp78Z9I&feature=youtu.be

 

 

Cela s’est passé lors de la journée de rencontre organisée le 11 novembre par le site www.temoins.com Chrétiens dans un monde nouveau.

 

Pour voir l’ensemble des interventions, vous pouvez cliquer sur :

http://www.temoins.com/index.php?option=com_content&view=article&id=1099:%C2%AB-chr%C3%A9tiens-dans-un-nouveau-monde-%C2%BB-la-journ%C3%A9e-du-11-novembre-2014&catid=5:reflexions&Itemid=64

 

 

 

 

 

 

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15 novembre 2014 6 15 /11 /novembre /2014 14:15

Les images qu’on se fait de Dieu, peuvent être des obstacles à une vie chrétienne libre, joyeuse, et agissante.

Un des obstacles est la peur. Peur d’un Dieu qui demanderait forcément des choses à l’opposé de leurs désirs. Donc on reste à distance pour ne pas entrer dans cette opposition.

Cette image est fausse. Dieu est au contraire celui qui nous aide à découvrir et réaliser nos vrais désirs.

C’est cela que j’ai découvert en faisant les Exercices spirituels de St Ignace de Loyola : cette expérience m’a permis de libérer mon désir profond.

Ensuite, je n’ai pas cessé d’aider les gens que j’accompagne dans des retraites ou dans la vie, à découvrir cela.

La volonté de Dieu n’est pas à chercher en dehors de soi. Comme si Dieu aurait écrit dans un grand livre ce que je dois faire. C’est terrible cette image, car comment découvrir ce qui y serait écrit ?

Mais aussi quelle image de Dieu cela véhicule !  : Un tyran qui décide à notre place. 

Non, une véritable expérience de Dieu  doit nous aider à aller au plus profond de nous  pour découvrir ce qui nous fera le plus vivre à plein, libèrera les désirs les plus profonds, les plus humains, les plus vivants qui vont nous permettre de bâtir notre vie.

Ce n’est donc pas un conflit entre notre désir et le désir de Dieu mais la recherche du désir de Dieu au plus profond, au plus fort et au plus vivant de notre désir.

 

Je suis née en dehors du christianisme. La foi, je ne l’ai pas bu avec le lait du biberon ! La foi, il a fallu dès le début que je la reprenne à mon compte, que je l’approprie avec des mots qui pouvait me parler. Donc dès le début, il y a eu toujours des questions, des recherches. Rien n’était évident, rien n’était acquis.

Cela me donne une sensibilité à l’incroyance,  une proximité avec les incroyants, une compréhension de la raison de l’incroyance, car le dialogue passe à l’intérieur de moi. Je cherche sans me lasser une manière de dire la foi qui soit crédible pour moi et donc pour d’autres. Cela me rend sensible aux manières d’en parler que je ne prends pas pour argent comptant mais que je soumets à examen, un exercice de pensée.

Cela je le fais au quotidien de ma vie de religieuse, de mon travail d’accompagnatrice spirituelle, d’animatrice de retraite, et de blogueuse aussi.

 

Nous sommes devant un défi énorme.

Pour ce travail, nous avons déjà de  bonnes ressources. En ce qui me concerne, parmi celles qui m’inspirent, il y a Bonhoeffer, Tillich.

Tillich a fait le constat que message n’est pas compris, que le fossé s’élargit de plus en plus entre la théologie et la pensée des gens qui vivent dans un monde placé sous le signe de la science.

Il s’est demandé : D’où vient ce divorce entre le message chrétien et la pensée moderne ? Et il se montre sévère pour les Eglises chrétiennes peinant à trouver un langage adapté à l’homme moderne. Tillich a su nous ouvrir le chemin en nous demandant de partir de l’homme et des ses questions d’aujourd’hui, confiant dans ses intuitions, pour indiquer un Dieu qui lui parle de sa vie.

 

Plus près de nous il faut citer Moltmann et du côté catholique, d’autres auteurs sont de bons guides : Segundo : Qu’est-ce qu’un dogme ? Un livre superbe qui donne d’excellentes clés d’interprétation de la Bible et fait du ménage dans l’accumulation de la pensée catholique. Et aussi Joseph Moingt.

 

Le fossé entre le message chrétien et la pensée moderne, porte aussi sur l’anthropologie du féminin et du masculin. La pensée catholique, mais aussi certains courants fondamentalistes du protestantisme, continuent de véhiculer des images obsolètes, conservatrices, aliénantes pour les femmes. Des théologiennes parmi bien d’autres et comme par exemple Jonhson et Schneiders ont relevé le défi sur ces questions.

 

Donc, déjà beaucoup de théologiens ont su relever ces défis et travailler à combler le divorce entre foi chrétienne et monde moderne.

Mais il reste encore beaucoup à faire et surtout comment cela a-t-il rejoint le terrain des paroisses, des homélies, des catéchismes, des mentalités… ? Quand je fais attention à ce qui est véhiculé dans la liturgie, ce qui est dit dans des sermons, écrit dans des catéchismes…cela permet de voir l’ampleur du travail à faire !

* Quand cessera-t-on définitivement de penser que la Bible « est » la Parole de Dieu de manière fondamentaliste ? Alors qu’elle est une parole d’hommes marquée par leurs limites, leurs préjugés, leurs intérêts.  Et à ces hommes,  Dieu essaie avec patience d’insuffler une conversion : conversion de toutes ces fausses images qu’ils se font de Lui … Lente, patiente pédagogie. Le passage de la mer rouge, par exemple,  n’est pas l’acte d’un dieu qui ferait périr des soldats égyptiens mais, sous la forme de ce récit, la conscience qu’Israël a eu d’un Dieu qui dit non à l’esclavage.

 

*Quand cessera-t-on définitivement d’instrumentaliser la Bible pour justifier des conceptions   qui enferment dans des schémas intouchables ?  Par exemple : « Homme et femme, il les créa », n’est pas le sceau d’une volonté de Dieu qui instituerait le mariage, mais le signe du respect et la raison de toute différence dont le féminin et le masculin sont le paradigme.

Ou encore, le choix des évangiles de relater la présence  de 12 apôtres masculins n’indique pas une  détermination du Christ à exclure les femmes des ministères,  mais renvoie à  la conscience de la première communauté chrétienne d’être le nouvel Israël.

 

*Quand cessera-t-on définitivement de penser la croix du Christ comme le prix à payer pour que Dieu pardonne ? Il s’agit au contraire de saisir à quel point les actes du Christ, ses paroles, ses décisions ont été  et sont, encore aujourd’hui,  libérateurs, provoquant  la mise en danger de toute forme de totalitarisme, fut-il religieux.  Alors la croix n’est  pas le prix à payer mais l’aboutissement d’un chemin de liberté. 

Quand cessera-t-on…

Au travail mais en sortant des lieux dormant pour aller vers ce qui nait, cherche à vivre et à espérer.

 

Par ailleurs, le langage peut être juste mais il est inopérant.

On ne perçoit pas les conséquences psychologiques et sociales des fondamentaux de la foi On ne fait pas le lien entre ce que dit la foi et des réalités humaines.

Encore aujourd’hui :

*Pour parler d’un décès : « Dieu a rappelé à lui… » Alors, comme cela, Dieu décide la mort des gens ? Il laisse en vie certains et fait mourir d’autres ? Mort dans un accident…Dieu a rappelé à lui ? Je sais bien qu’on peut interpréter autrement cette phrase mais évitons les phrases ambigües qui induisent des fausses images de Dieu. Cherchons d’autre manière comme : Dieu l’a accueilli dans son amour.

*Dans une prière de début de repas : « Donne du pain à ceux qui n’en ont pas ». Prière qui se défausse sur Dieu de ce qui relève de notre responsabilité.

Dieu n’est pas un distributeur. Cela est plus digne de Dieu de dire : « Tu veux un monde juste où tous auront du pain. Aide-nous à être artisan de ton désir. »

A chaque fois, la question à se poser, l’acte de penser à faire est : dire cela, quelle conséquence cela a ? Quelle image de Dieu cela induit ?

*Dans certains pays le rituel de sépulture se fait par crainte des morts. Si le rituel est négligé, le mort viendra hanter les vivants pour leur faire du mal. Si ces régions ont été touchées par le christianisme, comment se fait-il que la foi en la résurrection ne vienne pas guérir de cette crainte ? Les morts sont dans l’amour de Dieu donc ne peuvent nous vouloir que du bien. Ce fondamental de la foi est inopérant socialement.

Et dès le début du christianisme :

*Comment se fait-il que le christianisme n’ait pas rejeté l’esclavage et comment se fait-il que des milieux marqués par le christianisme aient justifié la supériorité d’une race sur d’autres, le racisme et le sexisme ?

 « Dieu fit l’humain à son image et à sa ressemblance, masculin et féminin, il les fit » aurait du être le contrepoison suffisant pour éradiquer ces injustices : puisqu’il est à l’image de Dieu, aucun humain ne peut appartenir à un autre,  aucun humain n’est moins humain qu’un autre, aucun sexe n’est supérieur à l’autre. Ce verset a donc été inopérant socialement.

Il a pu l’être chez certains êtres d’exception qui ont pu faire le lien entre une donnée de la foi et une réalité humaine mais ce la n’a pas touché une société entière.

Comment comprendre cette inopérance ?

La raison de cette inopérance est à situer dès le début du christianisme. L’on sait que face aux oppositions rencontrées, les 1ères communautés ont voulu faire profil bas, se couler dans les mœurs de la société en ne remettant pas en cause l’esclavage et le statut inférieur des femmes par exemple. Mais il me semble qu’il y a une raison plus profonde encore qu’on trouve dès le discours de Pierre à la Pentecôte.

En disant : vous serez baptisé et vous serez sauvé-es, Pierre instaure une religion de salut qui fonde la foi sur la vie éternelle et ne la fonde pas sur la construction d’un royaume de justice et de paix pour l’aujourd’hui du monde. Il y a ici la perte de la dimension historique du christianisme perte de sa figure de transformation du monde pour la reléguer uniquement dans le salut  individuel après la mort.

Jusqu’à récemment dans l’histoire de nos églises, c’est cette position de Pierre qui a prévalu. J’en veux pour preuve que c’est bien cette question du salut qui nous a valu l’opposition catholique-protestant : sauver par la grâce ou par les œuvres ?

 

L’émergence d’une autre manière de faire Eglise passe par l’émergence de nouveaux langages de la foi irrigant de nouvelles pratiques.

C’est ce que fait, parmi d’autres, le site temoins.com qui nous réunit aujourd’hui. Avec lequel, la catholique que je suis se sent en parfaite connivence.

D’ailleurs pour moi, nos anciennes divergences n’ont plus lieu d’être. Ce qui fait notre unité c’est de chercher en quoi, comment le Christ est chemin de bonheur pour nos contemporains et d’en vivre pour pouvoir le partager, pour construire des sociétés humanisées et humanisantes.

 

Cette intervention a été faite lors de la rencontre du 11 novembre organisée par le site témoins.com : http://www.temoins.com

 

 

 

Voir l’intoduction à sa pensée par R.Winling dans Théologiens contemporains, Centurion

J.Moltmann, Trinité et Royaume de Dieu, Cerf, Coll. Cogitatio fidei n°123

JL Segundo, Qu’est-ce qu’un dogme, Cerf, Coll cogitatio fidei n°169

J.Moingt, Dieu qui vient à l’homme, t1 et 2, Cerf, Coll cogitatio fidei n°222 et 245

E.Johnson, Dieu au-delà du masculin et du féminin, Cerf, coll cogitation fidei, n°214

S.Scheiders, le texte de la rencontre, Cerf, coll lectio divina, n°161

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12 juillet 2014 6 12 /07 /juillet /2014 21:50

 

 

 

Voici que qu’écrit Raymond Winling à propos du  théologien Paul Tillich  (1886-1965)

« Tillich est un croyant convaincu que le christianisme apporte le plus authentique message de salut que l’homme puisse trouver sur cette terre.

 Mais il constate que ce message n’est pas compris. Tout se passe comme si les déformations et les distorsions se multipliaient et rendaient impossible une perception qui ne soit pas caricaturale. ..

Le fossé s’élargit de plus en plus entre la théologie et la pensée des laïcs qui vivent dans un monde placé sous le signe de la science.

D’où vient ce divorce entre le message chrétien et la pensée moderne ?...

Tillich sait quel rôle a joué la pensée de type scientifique avec son impérialisme exclusif.

Mais il voit d’autres raisons : il se montre sévère pour les Eglises chrétiennes qui vivent sur le passé et se montrent incapables  de trouver un langage adapté à l’homme moderne.

Que faire ?...

Partir de l’homme et des ses questions d’aujourd’hui, faire appel à ses intuitions, le conduire vers le Dieu qui lui parle à travers l’Ecriture et lui apporte la réponse aux questions vitales que la science se montre incapable d’assumer de façon valable. »

(La théologie contemporaine, Ed le Centurion, 1983, page 244)

 

Tillich est mort au moment du Concile Vatican II. Depuis beaucoup de théologiens ont su relever le défi et travailler à combler le divorce dont il parle. Mais il reste encore beaucoup à faire et surtout comment cela a-t-il rejoint le terrain des paroisses, des homélies, des catéchismes, des mentalités… ?

 

Quand cessera-t-on définitivement de penser que la Bible « est » la Parole de Dieu de manière fondamentaliste ? Alors qu’elle est une parole d’hommes marquée par leurs limites, leurs préjugés, leurs intérêts.  Et à ces hommes,  Dieu essaie avec patience d’insuffler une conversion : conversion de toutes ces fausses images qu’ils se font de Lui … Lente, patiente pédagogie. Le passage de la mer rouge, par exemple,  n’est pas l’acte d’un dieu qui ferait périr des soldats égyptiens mais, sous la forme de ce récit, la conscience qu’Israël a eu d’un Dieu qui dit non à l’esclavage.

 

Quand cessera-t-on définitivement d’instrumentaliser la Bible pour justifier des conceptions   qui enferment dans des schémas intouchables ?  Par exemple : « Homme et femme, il les créa », n’est pas le sceau d’une volonté de Dieu qui instituerait le mariage, mais le signe du respect et la raison de toute différence dont le féminin et le masculin sont le paradigme.

Ou encore, le choix des évangiles de relater la présence  de 12 apôtres masculins n’indique pas une  détermination du Christ à exclure les femmes des ministères,  mais renvoie à  la conscience de la première communauté chrétienne d’être le nouvel Israël.

 

Quand cessera-t-on définitivement de penser la croix du Christ comme le prix à payer pour que Dieu pardonne ? Il s’agit au contraire de saisir à quel point les actes du Christ, ses paroles, ses décisions ont été  et sont, encore aujourd’hui,  libérateurs, provoquant  la mise en danger de toute forme de totalitarisme, fut-il religieux.  Alors la croix n’est  plus le prix à payer mais l’aboutissement d’un chemin de liberté.

 

Quand cessera-t-on définitivement de penser que Dieu aurait écrit dans un grand livre les choix importants de nos vies, auxquels Il nous aurait, par ailleurs,  prédestinés ? C’est oublié que  Dieu s’inscrit au creux de notre liberté. C’est oublié que Sa tendresse nous supplie simplement  d’être nous-mêmes,  d’être  heureux-se .

 

Quand cessera-t- on d’enfermer l’humain dans une faute originelle, qui le dépasse ? N’est-il pas urgent de changer notre regard sur l’être humain ? La Bienveillance est inscrite, gravée en tout homme, toute femme. Elle est  plus résolue que la culpabilité, plus forte que la désespérance, plus tenace que la cruauté. Un Autre nous l’a dit : notre réalité ultime s’écrit en lettres de tendresse. 

 

Katrin Agafia et Michèle Jeunet

 

 

 

 

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30 mai 2014 5 30 /05 /mai /2014 18:00

Cenacle-2.jpg(Tableau sur bois peint par Sr Ghislaine Pauquet. 

Centre spirituel du Cénacle de Versailles. France)

 

Le centre spirituel du Cénacle de Versailles est animé par une famille spirituelle qui a choisi un lieu biblique comme fondement de sa vie spirituelle : un lieu qui s’appelle « Cénacle »

Un nom qui n’est pas facile à porter pour 2 raisons :

-le langage courant du dictionnaire, le définit comme « Petit groupe fermé sur lui-même » ! Dur à porter !

-la prédication courante des homélies l’assimile à la seule peur des disciples enfermés.

 

Nous allons essayer de déconstruire ces images !

 

1-Le premier lieu du Cénacle, c’est le lieu de la Cène, le lieu du dernier repas de Jésus.

C’est donc le lieu du don de sa vie que fait Jésus, par amour pour nous, pour aller jusqu’au bout de la fidélité à Sa mission. 

Geste du pain et du vin qui signifie qu’il entre librement dans sa passion, qu’il se livre totalement. Thérèse Couderc, fondatrice de la Famille spirituelle du Cénacle a tellement contemplé ce mystère de la Cène au Cénacle, qu’elle a fait de ce mot «  se livrer » l’expression ultime de la réponse d’amour qu’on peut faire au Christ : se livrer au Christ en réponse au don qu’il nous fait.

 

2-Le deuxième lieu du Cénacle, entre Pâques et Ascension

Ce temps commence bien par la peur et l’enfermement : « Le soir de ce même jour…toutes portes closes par peur…là où se trouvaient les disciples, Jésus vint… » Jn 20/19

C’est un lieu de passage, un temps de passage de la peur à la foi qui prend du temps ! C’est un lieu où l’on se laisse éduquer par Jésus, où on le laisse nous pacifier.

 

3-Mais il y a un 3ème temps, celui entre Ascension et Pentecôte.

Ce 3ème temps est méconnu par beaucoup de chrétiens et d’homélies ! C’est le temps du Cénacle entre Ascension et Pentecôte.

Nous lisons cela en Ac1/1…13

01  Mon cher Théophile, dans mon premier livre j'ai parlé de tout ce que Jésus a fait et enseigné depuis le commencement,
02  jusqu'au jour où Il fut enlevé au ciel après avoir, dans l'Esprit Saint, donné Ses instructions aux Apôtres qu'Il avait choisis.
03  C'est à eux qu'Il S'était montré vivant après Sa Passion : Il leur en avait donné bien des preuves, puisque, pendant quarante jours, Il leur était apparu, et leur avait parlé du royaume de Dieu.
04  Au cours d'un repas qu'Il prenait avec eux, Il leur donna l'ordre de ne pas quitter Jérusalem, mais d'y attendre ce que le Père avait promis. Il leur disait : « C'est la promesse que vous avez entendue de ma bouche.
08  Mais vous allez recevoir une force, celle du Saint-Esprit, qui viendra sur vous. Alors vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'aux extrémités de la terre. »
09  Après ces paroles, ils Le virent s'élever et disparaître à leurs yeux dans une nuée.
12  Alors, ils retournèrent du mont des Oliviers à Jérusalem,
13  Arrivés dans la ville, ils montèrent à l'étage de la maison.

.

et en Lc 24/50-52

50  Puis Il les emmena jusque vers Béthanie et, levant les mains, Il les bénit.
51  Tandis qu'Il les bénissait, Il se sépara d'eux et fut emporté au ciel.
52  Ils se prosternèrent devant Lui, puis ils retournèrent à Jérusalem, remplis de joie.

 

Entre Ascension et Pentecôte c’est le consentement à une absence pour une autre présence : « Une nuée vint les soustraire à leur regard » Ac 1/9

Entre Ascension et Pentecôte, ce temps du Cénacle est éducation à voir le Christ d’une autre manière, se familiariser à un autre forme de présence

1- « Ils montèrent à la chambre haute, où ils se tenaient habituellement » Ac 1/13

On y voit cette première communauté, d’homme et de femmes réunis ensemble. Cela nous indique une première attitude spirituelle à garder précieusement, à cultiver. Viser la communion. Se donner, se trouver, de lieux de partage, pas seulement en avoir mais aussi en estimer la valeur, s’y investir. En saisir le sens profond : Il s’agit de faire l’expérience d’une présence du Christ, selon la promesse faite : «  Que deux ou trois soient réunis en mon nom, je suis là au milieu d’eux » Mt 18/20.

La communauté est lieu de présence du Christ, au milieu d’elle, en elle. Corps du Christ.

 

2-« Tous d’un même cœur, étaient assidus à la prière » Ac 1/14

Prier pour :

-Devenir d’autres Christ

C’est tout l’enjeu de la prière avec l’Evangile. En contemplant le Christ, en fait, je me mets en situation de suite du Christ, comme les disciples qui l’ont suivi sur les routes de Palestine. Le fréquenter pour lui devenir semblable. Le regarder, l’écouter pour regarder comme il regarde, saisir de l’intérieur les grandes options de son existence pour que peu à peu elles imprègnent mes décisions. Saisir sa manière particulière d’aimer, me laisser aimer par lui pour qu’il puisse me transformer pour aimer à mon tour par lui.

 « Dans les actes du Christ, aussi bien que dans ses paroles, se révèlent les principes qui inspirent son action, les jugements de valeur qui dictent son attitudes, et commandent ses réactions. C’est cela que nous devons faire nôtre, l’incorporer progressivement à la substance de notre être. Plus nous le ferons, plus nous agirons spontanément comme le Christ…Nous serons d’autres Christ, c’est à dire des chrétiens. C’est pourquoi, la méditation de l’Evangile n’est pas un exercice facultatif pour ceux qui veulent vivre leur incorporation au Christ. C’est là qu’ils en puiseront les moyens » (Y de Montcheuil, Problèmes de vie spirituelle, Epi, 1947, p98)

 

 

-Etre animé-e par l’Esprit

Mais cela ne se fait pas à la force du poignet, de manière volontariste. C’est de l’ordre d’un abandon, d’un « laisser-faire » de l’accueil d’un don. Ces 10 jours entre Ascension et Pentecôte sont symboliques  d’un Espace. Faire de la place à Dieu, ne pas se précipiter dans l’action. Entrer dans un discernement avant d’agir pour que notre action qui reste bien la nôtre, soit aussi celle de Dieu. Que notre action soit animée par l’Esprit. C’est les sens de cette expression si audacieuse qu’on trouve dans le Actes : « L’Esprit Saint et nous même avons décidé… » Ac 15/28

Chacun-e de nous dans son désir d’être configuré-e au Christ, dans le consentement à lui devenir semblable et par  l’espace que nous offrons à l’Esprit pour discerner ce qui est selon Dieu, chacun-e de nous,  devient  présence du Christ dans ce monde. Autre Christ.

Pour cela il est nécessaire de garder des espaces de recul dans son emploi du temps, des temps pour soi, temps de solitude, de silence, d’intériorité, de relecture du vécu. Descendre au plus profonde de soi pour reconnaître ce qui est source de paix, de joie, d’élan paisible, source de plus grande confiance en soi, dans les autres en Dieu, source de plus d’espérance et d’amour. Car ce sont des signes de l’Esprit. Un désir, une pensée, un sentiment, des idées qui sont portés par ce climat, on peut y discerner l’Esprit du Christ. On peut les accueillir et les réaliser. Au contraire, un désir, une pensée, une idée, un sentiment porté par un climat de peur, de méfiance, d’agitation, de découragement, de tristesse, de ressentiment sont plutôt indicateur d’un mauvais esprit et l’indication d’un combat spirituel à mener.

 

3-« Tous d’un même cœur étaient assidus à la prière avec quelques femmes dont Marie mère de Jésus et avec ses frères ». Ac 1/14

Peser le « tous » ; Il s’agit de l’Eglise entière ! Femmes et hommes. 120 nous dit le verset 15. Tous et toutes disciples. Il est regrettable que la plupert des représentations du Cénacle ou de la Pentecôte ne montre que …les Apôtres!

Regarder Marie. Quel est son rôle ici ? Pourquoi la penser uniquement silencieuse? Elle qui est remplie de l’Esprit depuis l’Annonciation, elle qui retenait toutes ces choses dans son cœur (Lc 2/19)…Pourquoi ne pas la voir enseignant à tous et toutes les chemins de la foi, l’accès nouveau à Dieu inauguré par le Christ ? Entendre Marie nous faire comprendre son absence comme une chance. Marie nous enseignant à désormais le découvrir, le reconnaître à l’œuvre par nos mains. Marie nous donnant goût à le contempler pour que quelque chose de ses yeux, de son cœur deviennent les nôtres pour devenir Christ pour les autres. Regarder Marie transmettant ainsi son expérience du Christ son Fils et son Sauveur.

 

4-« Vous serez mes témoins à Jérusalem et dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu’aux confins de la terre » Ac1/8

Il s’agit ensuite de chercher et de trouver le Christ au cœur même de l’action. Le monde comme lieu pour trouver Dieu, le monde comme lieu de Dieu. Cela ouvre un accès à Dieu par la médiation du monde : tout ce qui est bon, juste vrai beau, en moi dans les autres, dans les choses est Présence de Dieu. Présence à  adorer, à contempler. L’apostolat n’est pas d’apporter Jésus mais de le découvrir déjà à l’œuvre dans ce monde, révéler sa présence au cœur de ce que nous vivons.

« Je vis écrit comme en lettre d’or ce mot de bonté…je le vis, écrit sur toutes les créatures…toutes portaient ce nom de bonté, je le voyais même sur la chaise qui me servait de prie-Dieu. Je compris alors que tout ce que ces créatures ont de bon …est un bienfait que nous devons à la  bonté infinie de notre Dieu, afin que nous la rencontrions en tout et partout » (Lettre de Ste Thérèse Couderc du 10 août 1866)

Cela rejoint la phrase attribué à Ignace de Loyola : « Chercher et trouver Dieu en toutes choses »

 

Ensemble, dans la contemplation du Christ et l’écoute de l’Esprit, pour être apôtre, voici ce temps du Cénacle entre Ascension et Pentecôte. Un temps et un espace dont on ne peut faire l’impasse si l’on veut que sa vie chrétienne devienne de plus en plus vivante.

 

 

 

 

 

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20 avril 2014 7 20 /04 /avril /2014 10:54

Resurrection.jpg

Jésus a été jusqu’au bout de la nuit, jusqu’au plus profond des enfers.

Personne ne peut dire : je suis trop loin pour lui.

 

Il vient nous prendre la main pour nous ramener au jour.

 

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28 mars 2014 5 28 /03 /mars /2014 10:22

 

 

Claude Géffré, établit une sorte de cahier des charges pour une théologie d’aujourd’hui. Il s’agit d’un véritable travail d’inculturation. Pas une simple adaptation mais une interprétation créatrice.

Pas une simple  traduction car on ne peut pas traduire sans déjà réinterpréter le contenu parce qu’il y a un lien indissociable entre les mots du langage et les signifiants. Le langage n’est pas seulement l’enveloppe matérielle d’une pensée, c’est le langage lui-même qui est le lieu du sens.

Il faut donc risquer une ré-interprétation du contenu. Cela ne se fera pas par un tri entre ce qui serait des éléments substantiels et accidentels, car la vérité du christianisme n’est pas identifiable avec un corpus de propositions de sens immuables. Le christianisme n’est pas d’abord un message auquel il faut adhérer mais « une expérience qui est devenue un message ».

Une nouvelle inculturation exige de réactualiser cette expérience chrétienne fondamentale dans un nouveau contexte historique et culturel, de produire une nouvelle figure historique du christianisme dans l’ordre de la confession de foi et de la pratique. C’est une opération herméneutique qui exige les questions suivantes :

-Quels sont les éléments fondamentaux de l’expérience chrétienne dont témoigne le Nouveau Testament ?

-Quelle est l’expérience historique, culturelle, religieuse de ceux à qui l’Evangile est annoncé ?

-Quelles corrélations critiques à faire entre ces  expériences ?

Le Nouveau Testament est un acte d’interprétation à confronter à un autre acte d’interprétation d’une Eglise incarnée dans une culture donnée.

C’est un travail d’actualisation.

Pour cela il faut rechercher ce qui essentiel à la foi apostolique : « ce qui est requis, c’est cela qui suffit ». En croyant que l’unité de foi ne requiert pas forcément une uniformité : elle n’est pas compromise par une pluralité de théologies, spiritualités, pratiques.

Et penser que le christianisme est mieux qu’une religion qui ferait nombre avec d’autres.

C’est un Esprit qui structure et métamorphose des éléments culturels, religieux, éthiques pré-existants et parce que toute tradition religieuse peut être l’expression de la présence universelle de l’Esprit de Dieu depuis l’origine du monde et parce que certaines de leurs richesses peuvent concourir à une meilleure explication des richesses de la religion en esprit et vérité inaugurée par le christianisme.

Ce qui fait la singularité du christianisme, ce n’est pas un ensemble d’objectivations doctrinales, rituelles, institutionnelles mais la puissance imprévisible de l’Esprit du Christ. 

La foi chrétienne  est toujours informée, conditionnée, colorée par l’expérience culturelle d’une époque.

La Foi selon sa visée  est substantiellement identique, mais il y a des âges historiques de la foi selon des univers culturels différents. La culture entre donc dans la définition de la foi.

Il ne peut y avoir appropriation de l’Evangile que sur la base d’une interpellation mutuelle et critique de la foi et de l’expérience humaine.

 

Claude Geffré invite donc à se poser les questions suivantes :

1-La parole du chrétien parle-t-elle au présent ?

2-Rejoint-elle les états de conscience de ceux auxquels elle s’adresse ?

3-Promeut-elle une nouvelle existence à partir de l’interprétation de leur vie ?

4-Y-a-t-il une interaction entre la foi et l’expérience humaine façonnée par une culture ?

5-Est-ce que la manière de parler de la  foi oriente, éclaire l’expérience humaine, accomplit ses attentes mais aussi les déplace, les met en jugement ?

 

 

 

C.GEFFRE, “la rencontre du christianisme et des cultures” le Supplément 192 (1995) p 69-91

E.SCHILLEBEECKX, Christ, the experience of Jesus as Lord, New-York, Crossroad, 1980

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